Cette pièce, découverte grâce à l'intermédiaire du Rhinocéros (qui en parle bien mieux que moi), est composée de la juxtaposition de deux pièces en un acte : Il faut qu'une porte soit ouverte ou fermée de Musset, et Je ne veux pas me marier, de Jean-Marie Besset.
Deux époques, le XIXème siècle romantique et le XXIème, mais un seul sujet, le couple, et ses travers, l'inconstance des hommes, les angoisses des femmes, et la confiance qui s'établit difficilement entre eux.
Il faut qu'une porte soit ouverte ou fermée décrit la séduction par un comte élégant d'une jeune veuve de 28 ans. C'est son jour, mais seul le comte a bravé la pluie pour venir. Elle se prépare pour le bal du soir, elle belle, libre, pleine d'esprit et indépendante. Il est amoureux, intimidé, maladroit, et un peu hussard sur les bords. Elle ne sait pas qu'il l'aime, ou elle le sait trop, et ne veut pas le savoir. Un condensé d'esprit à la Musset, presqu'à la Wilde, avec une touche des Petites Misères de la Vie Conjugale, interprêté avec beaucoup de talent par Blanche Leleu et Adrien Melin.
Après le dénouement, heureux, on s'en douteraitr, la future comtesse reste quelques instants en arrière, dans son salon, tandis que des déménageurs emmènent les meubles. Sortant à la suite, elle croise une autre jeune femme, son arrière-arrière-arrière petite fille, robe mondrian et chignon lâche. Elle, c'est Vivien (Chloé Olivères), une prof agrégée de maths à la veille de son mariage, dans les derniers préparatifs, que vient déranger son promis, Tigrane (toujours Adrien Melin). De fil en aiguille, les failles de leur couple apparaissent, et tâchent leur souvenirs heureux. Du mariage, Vivien ne voit bientôt plus que la privation de liberté qui l'accompagne... Tigrane est-il vraiment l'homme avec qui elle souhaite passer sa vie ?
Le même acteur joue les fiancés des deux pièces (en étant un chouia meilleur dans la seconde, d'ailleurs), comme si l'éternel masculin traversait les pièces, tandis que les deux femmes se succèdent, l'une portant l'angoisse d'être abandonnée après avoir été séduite, tandis que l'autre craint plus l'enfermement dans un statut. Et cette rencontre, ce regard échangé, emprunt d'une compréhension intime et d'étonnement, est sans doute, dans son silence même, le climax de la pièce.
Au final, c'est un pari audacieux et réussi, joué par trois excellents jeunes acteurs et une mise en scène de très belle qualité.
Allez-y vite, elle ne se jouera plus très longtemps : Il faut je ne veux pas, au théâtre de l'Oeuvre (près de la Place Clichy, dans le nord de Paris), jusqu'au 15 Avril 2012.