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7 mars 2011 1 07 /03 /mars /2011 09:00

Cette exposition, consacrée au mouvement De Stijl et à son représentant le plus célèbre, Mondrian, se divise en trois parties, assez mal reliées entre elles.

Dans les premières salles, une histoire du mouvement De Stijl est montrée. Des tableaux de jeunesse de ceux qui en seront les représentants, sont exposés. C'est au début un résumé des styles avant-guardistes des premières années du XXème siècle : tel portrait de Mondrian fait penser à du Klimt

Mondrianfleur.jpg

Tel paysage de dunes rappelle les couleurs de Van Gogh

Dunesmondrian.jpg

Il y a également quelques oeuvres d'autres artistes du mouvement De Stijl, comme Theo Van Doesburg, mais de moins belle facture que celles du Mondrian. Mais généralement, malgré quelques oeuvres splendides (comme l'Arbre de Mondrian, ci dessous) cette partie ne m'a pas enchantée : on dirait du Klimt ou du Van Gogh, mais en moins bien ...

arbregris.jpg

 

Alors qu'arrivée dans la seconde partie, consacrée à Mondrian et à son style si particulier, j'ai été enchantée ... Déjà parce que ces lignes droites et noires coupant une toile blanche comme la neige, parce que ces couleurs franches, parce que ces symboles géométriques me séduisent au delà de toute expression !

Mondrian1.jpg

Et en voir beaucoup, les uns après les autres, dans la même pièce, apporte un supplément indéniable à l'oeuvre de Mondrian. Les cadres deviennent des fenêtres ouvertes sur un autre univers infiniment plus simple que le nôtre, formé de lignes noires et de carrés de couleurs, doté de règles physiques différentes des nôtres. Comme une ouverture sur un monde de science-fiction poussé à l'extrême.

Mondrian2.jpg

Ou les cadres semblent des pages écrites dans un langage inconnu, et le regard les parcourt les unes après mes autres comme s'il déchiffrait une histoire.

mondrian4.jpg

 

Après un passage dans une reconstitution de l'atelier de Mondrian (sans grand intérêt, on se croirait chez Ikea), on découvre la troisième et dernière partie de l'exposition : de l'influence de ce courant pictural dans l'architectural.

Là, les lignes droites parlent et deviennent des poutrelles, les carrés de couleur des parois et les espaces blancs des vides où le regard se perd.

Mondrianarchitecture.jpg

J'ai été très étonnée de découvrir à quel point ces artistes, et Mondrian en tête, avaient révolutionné la manière d'appréhender l'architecture et la décoration.

Si j'ai dans ma cuisine un mur - et un seul  - de brique, c'est en quelque sorte à Mondrian que je le dois ...

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6 mars 2011 7 06 /03 /mars /2011 09:00

PecheurdIslande.jpg"Et puis, avec les premières brumes de l'Automne on rentre au foyer à Paimpol ou dans les chaumières éparses du pays de Goëlo, s'occuper pour un temps de famille et d'amour, de mariages et de naissances. Presque toujours, on trouve là des petits nouveaux-nés, conçus l'hiver d'avant, et qui attendent des parrains pour recevoir le sacrement du baptême : il faut beaucoup d'enfants à cette race de pêcheurs que l'Islande dévore."

 

Tous les étés, les pêcheurs de Paimpol et sa région partent en pêche au large de l'Islande. Pour eux, c'est une période étrange qui débute, à quelques uns dans un bateau minuscule, à travailler par quart de quelques heures, sous le soleil de minuit. Pour leurs femmes, leurs fiancées, leurs amoureuses restées au pays, c'est l'inquiétude, la solitude et l'angoisse dans la chaleur (on est en Bretagne, faut pas exagérer) et les fleurs de l'été.

Quand les brumes de l'automne arrivent, quand les fleurs se fanent, quand l'hiver arrive, la joie retourne avec les bateaux de pêche.

C'est ce que raconte Pêcheur d'Islande. Deux hommes, deux pêcheurs. Deux femmes. Yvonne, une vieille grand mère adorable à la large coiffe et au petit foulard brun, pas bien riche, mais honnête. Une vieille veuve de pêcheur, mère de pêcheur, grand-mère de pêcheur, qui a donné son tribu à la mer : de toute sa famille, il ne lui reste que son dernier petit-fils, Sylvestre.

Sylvestre est marin sur la Marie. Un bon gars, tendre et honnête, une crème aux yeux clairs, qui courtise sagement la soeur de Yann.

Yann, c'est autre chose : il est aussi marin sur la Marie, mais c'est un grand gaillard sombre, taciturne, orgueilleux. Sylvestre et lui s'entendent comme frères, mais le tendre Sylvestre ne parvient pas vraiment à comprendre pourquoi Yann reste si insensible aux avances de Gaud, sa cousine.

Gaud, à côté de ces trois êtres purs et durs comme de la roche, c'est une fille de la ville, une élégante aux mains soignées, mais au coeur lumineux, pris en une soirée par le fier Yann.

 

"Dehors, ce devait être la mer et la nuit, l'infinie désolation des eaux noires et profondes."

 

Mais plus que l'amour et la tendresse qui lient ces quatre êtres, c'est la mer qui est au coeur de ce roman. Une mer divinisée, sauvage et généreuse, celle qui donne la vie et celle qui la reprend. J'ai énormément aimé cet aspect, qui m'a rappelé des contes et des histoires de Bretagne. La mer... l'autre épouse, celle qui vole une part de l'âme des maris, avant de les voler tout entiers. Celle que les hommes aiment et que les femmes haïssent.

 

"Mais c'était une lumière pâle, pâle, qui ne ressemblait à rien; elle trainait sur les choses comme des reflets de soleil mort."


Et ce qui ne gâche rien, c'est un roman excessivement bien écrit. Le style m'a souvent fait penser à de la poésie, comme un roman écrit par Baudelaire. Le vocabulaire est riche, excessivement complexe, et d'une précision parfaite. Le rythme des phrases, comme une musique, donne à sentir l'angoisse de l'attente, la monotonie des journées en mer, ou les ravissements du sentiment amoureux. Mais contrairement, à d'autres auteurs de l'époque, il n'est jamais lourd, et s'arrête toujours avant l'emphase.

En résumé, un magnifique roman que je conseille à tous les amoureux de la langue française - et de la Bretagne.

 

"Le navire se balançait lentement sur place en rendant toujours la même plainte monotone comme une chanson de Bretagne, répétée en rêve par un homme endormi."

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5 mars 2011 6 05 /03 /mars /2011 16:00

Arte consacrait cette semaine ses soirées à la mode. Je n'en ai pas tout regardé, mais Mercredi, je suis tombée sur deux émissions appelées toutes les deux : Le jour d'avant. Les 24 h précédant le défilé, chez Jean-Paul Gaultier et chez Sonia Rykiel.

Je ne suis pas la mode. S'il m'arrive de m'extasier devant telle ou telle robe, ou telle paire de chaussures aux talons extravaguants, je suis bien incapable de reconnaître la patte d'un créateur ou sa philosophie. C'est un manque de culture que je ressens terriblement, car la haute-couture est un art, et de tous les arts peut-être le plus éphémère et gratuit, et donc le plus nécessaire.

Gautier.jpg

Je me suis donc postée devant ma télé, mon ordinateur sur les genoux (j'avais des billets en retard (je suis incapable de regarder la télé sans faire quelque chose d'autre en parallèle)) et ai écouté et regardé de toutes mes oreilles et de tous mes yeux.

C'était passionnant de voir les coulisses d'un show pareil. De voir le travail. De voir l'envie. De voir l'amour. C'était extraordinaire de voir ces deux artistes en plein travail.

Les deux ? J'ai été séduite par Jean-Paul Gaultier. Dans le quotidien (et même pire que dans le quotidien, dans le stress le plus absolu qui précède un défilé), c'est un homme souriant, gai, dynamique. Il a fait ma conquête en quelques secondes : le type capable, à quelques heures d'un défilé, la reine d'une ruche bourdonnante, d'aller admirer un coucher de soleil sur les toits de Paris, et reconnaître avec tendresse tous les monuments, ce type, je ne peux pas ne pas l'aimer.

GautierMaryl.jpg

Et puis, cette manière de créer des tenues fabuleuses en trois gestes au dessus d'une mannequin, cette imagination fantasque de petit garçon, cette collection hommage au cinéma, avec une Marylin extraordinaire, et une mariée divinement improbable ... C'était beau...

Gautiercroco.jpgEt il y a toute la ruche autour. Ces artisans dévouées. Ces femmes cousant, bouton après bouton, sans jamais s'inquiéter de l'extravaguance des tenues, ou de la minutie qui leur est demandée, elles sont merveilleuses. Elles sont des magiciennes qui transforment un simple tissu en fantasie. Une particulièrement : la brodeuse, qui a créé cette robe (euh, étrange ...) en crocodile, et qui est montée tout en haut, au paradis, pour voir défiler SA robe, les larmes dans les yeux.

Gautiermariee-copie-1.jpg

Quand aux mannequins, je partais avec un préjugé intense à leur égard, le genre de préjugé que peut avoir une fille de 1m60 et de hum, hum, 60 kg à leur égard. Ces grandes cruches !

Et ben non. Oui, elles sont immenses et beaucoup trop minces. Mais elles ne sont pas que ça : elles sont aussi belles (enfin, quand elles sourient). Gracieuses. Elegantes. Belles comme des modèles préraphaélites...

Pour voir la totalité de la collection, je vous conseille la collection automne-hiver 2009-2010 de Gaultier.

 

J'ai en revanche été plus déçue par le reportage chez Sonia Rykiel. Après toute l'effeverscence de Jean-Paul Gaultier, celui là m'a paru sage (malgré l'ambiance festive et enjouée), et moins créatif. Quant à l'ambiance ... Si Sonia Rykiel est une vraie artiste, elle vieillit et sa fille Nathalie, qui semble plus gestionnaire qu'artiste, est beaucoup moins sympathique.

Rykiel2.jpg

Est-ce du au reportage et au montage ? On parlait moins petites mains et art dans celui-là, et plus argent et people. J'y trouve moins de charme.

 

Cette soirée correspond tout à fait l'esprit du challenge Read me, I'm fashion, non ?

fashion


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5 mars 2011 6 05 /03 /mars /2011 09:00

Je vais commencer ce blablatage en piquant une idée à Yottidottir : elle a fait le tour des réjouissances culturelle qui l'attendent en Mars, me permettant de découvrir plusieurs événements à côté desquels je serais passée. Alors, je fais comme elle, et je vous donne mon programme (hypothétique, c'est pas impossible que je déborde sur Avril ...) du mois.

Côté cinéma, sort le très attendu (en tout cas par moi) Never let me go. Adapté du chef d'oeuvre d'Ishiguro (j'espère que vous avez suivi mes conseils et que vous l'avez lu !), il réunit une actrice que je n'aime pas, et deux acteurs que j'adore. Bien sûr, je vais aller le voir !

Alors que le thème ne m'attirait pas a priori, j'ai vu d'excellentes critiques sur Winter's bone (ici, ici et , par exemple), qui me donnent très envie d'aller le voir (même si va falloir ruser pour trouver des cinémas qui le jouent !).

Et puis, il y a True Grit, à aller voir en priorité !

 

Hammer-copie-1.jpgCôté cinéma, toujours, mais vieux cinéma, j'ai appris grâce au billet de Yottidottir l'existence d'un festival de cinéma d'épouvante au Musée d'Orsay : Dans la nuit de la Hammer. Au programme, de nombreux films de Terence Fisher, dont la plupart montre Christopher Lee en abominable bonhomme. Je ne vais pas tous aller les voir, mais j'avoue The horror of Dracula me tente ...

Et puis, l'affiche est années 50 à souhait !

 

kubrick.jpgEt la Cinémathèque lance son exposition Kubrick. Autant l'expo en elle-même ne me tente pas trop, autant la rétrospective dont elle s'accompagne, elle, si. Avoir la chance de revoir Barry Lindon (et de ré-entendre sa splendide bande originale), mais en salle ! Et découvrir 2001, l'Odyssée de l'espace, Lolita, Yes wide shut ou Shining (oui, je sais, ma culture kubrickienne a de large gaps puisque je n'ai vu aucun des quatre ...) !

Décidément, il faut que j'y aille !

 

Passons aux expositions, maintenant ...

La Pinacothèque s'agrandit et a donc décidé de faire une double exposition tournant autour de la naissance d'un musée. Si la première ( Esterhàzy  ) ne me tente guère - quoiqu'on puisse toujours y faire de jolies découvertes, la seconde, consacrée au Musée de l'Ermitage, musée dans lequel je rêve d'aller mais c'est pas pour demain, me met en transe. Du Rembrandt ! Du Titien ! Et même du C hardin ou du Greuze ... (En revanche, ni Rubens, ni Velasquez, ni Poussin ne suscite   beaucoup  d'enthousiasme chez moi ...). cranach-luxembourg.jpgJe dois aller voir cette expo, et le plus tôt sera le mieux ! 

Autre must, l'expo Cranach au Musée du Luxembourg. Je suis très heureuse que ce musée rouvre ses portes, et encore plus lorsqu'il s'agit d'une expo consacrée à un peintre que je découvre, mais que j'aime déjà d'amour.

 

Enfin, il s'agit de l'expo à Orsay concernant la Photographie préraphaelite. La peinture préraphaelite me séduit déjà (serais-je condamnée si je dis qu'en fait, je crois que je préfère ce style à l'Impressionnisme ?), et le peu de photographies de ce courant que j'ai pu voir m'enchante ... Je suis très heureuse que le Musée d'Orsay leur consacre une exposition - et l'année où on m'a offert un abonnement, en plus !

preraphaelite.jpgUne ballade d'amour et de mort, peut-on rêver titre plus romantique ?

 

Côté théâtre, pas grand chose de prévu, si ce n'est une pièce qui m'a été révélée par Le Monde : Alexis, une tragédie grecque, à la Grande Halle de la Villette, jusqu'au 12 Mars. Cette pièce mêle tragédie grecque, Antigone, et les émeutes qui ont secouées Athènes en 2008. Les trois aspects me séduisent : je VEUX aller la voir !

Et côté musique, un concert : on va aller voir Interpol au Zénith. J'espère que ça sera bien, malgré une salle qui n'est pas super, il faut le dire !

Et bien sûr, le Salon du Livre, avec les ami(e)s de whoopsy-daisy !

 

Revenons au blablatage traditionnel.

Tradition, tradition, j'ai craqué pour un challenge cette semaine :

Le défi Afrika, de Choupynette : il s'agit de lire des romans de littérature africaine en 2011, sans aucune limitation en terme de nombre ou de style. J'avais très envie de découvrir cette littérature : Choupynette nous donne en plus une liste non exhaustive, mais déjà très riche dans laquelle piocher.

defi_Afrika_Choupynette.jpg

Et puis, le logo, il est génial, non ?

Et puis, Gangoueus tient un blog merveilleux où il parle de littérature africaine. J'ai souvent noté ses titres, et ce challenge sera l'occasion de me replonger dans mes notes. Et pourquoi pas avec En attendant les barbares, de Coetzee, dont il a parlé vendredi ?

 

 

J'avais adoré Psychose, lorsque je l'ai vu à l'occasion de la rétrospective Hitchcock. Pour ceux qui n'ont pas pu le voir en grand écran, Arte le diffuse Lundi 7 Mars à 20h40. Un seul conseil : foncez !!

Et tant que j'y suis, France 4 diffuse Edward aux mains d'argent le lendemain soir ...

 

Et la semaine nordique continue ... avec le mois nordique ! Ça tombe bien, j'avais fait quelques emplettes, le festival de cinéma Nordica commence, le Salon du Livre va être consacré à cette littérature, et j'ai encore plein de musique dont je voudrais vous parler !

moisnordique.jpgAlors, on embarque pour le grand Nord, et on va voir le catalogue du Livre de Poche contenant tous les romans nordiques de leur collection (j'ai déjà noté La saga des émigrants de Wilhelm Moberg, les Contes d'Andersen et La sagesse de la mer de Bjorn Larsson) !

 

Autre excellente nouvelle : la suite du Trône de Fer va sortir !! On l'attendait depuis, euh ..., 2006 ?, et elle sort enfin ! C'est Aidan Moher qui nous l'annonce, et certains prévoient déjà des catastrophes naturelles qui pourront empêcher cet événement tant attendu !

Par ailleurs, deux nouvelles bandes annonces est disponible pour cette série ! La première est encore centrée autour du Trône de Fer.

 

 

La seconde, quant à elle, suit la trame de l'histoire et est disponible sur ce site.

Vivement le 17 Avril !

 

Sinon, Magemanda se demande pourquoi les films de fantasy sont plus mainstream que les romans de ce genre ;  Choupynette nous apprend que The King's speech va sortir en version expurgée aux Etats-Unis (une honte) !


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4 mars 2011 5 04 /03 /mars /2011 09:00

BlackSwan.jpg"Our new Swan Queen : the exquisite Nina Sayers."

L’avis de B :

J’ai été happé dès les premières minutes par cette histoire de fou à la mise en scène totalement baroque et pourtant incroyablement forte. Aronofski exploite avec maestria les potentialités de son décor et la musique, créant l’angoisse via ses couloirs tortueux, instillant le malaise dans les refuges les plus ultimes, jusqu’au moment où, comme pour l’héroïne, la tension devient permanente, harassante.

Les scènes d’hallucination sont très bien abordées, brouillant la frontière entre cauchemar et réel, installant une angoisse réelle alors pourtant que le réalisateur en fait des tonnes.

Outre cette mise en scène formidable, le film est littéralement porté par Nathalie Portman qui tient là le rôle d’une vie. Elle est purement époustouflante, en équilibre sur le fil du rasoir et toujours juste. J’ai été abasourdi par sa tessiture, tour à tour oie blanche et séductrice venimeuse et perverse et tellement d’autres choses encore.

 BlackSwan3.jpg

Elle est aussi servie par des seconds rôles brillants, Cassel au premier plan, pour une fois parfaitement canalisé et dirigé. Il est un parfait chorégraphe complexe et manipulateur, façonnant Nina pour tirer d’elle tout ce qu’elle peut donner et plus encore. Barbara Hershey est parfaite en mère castratrice, ballerine ratée qui a elle aussi façonné Nina mais pour être la ballerine parfaite, pour briller là où elle n’a jamais pu aller, en bref pour vivre la vie qu’elle n’a pu avoir. Winona Rider est une très baroque et terrifiante ex égérie déchue par le passage du temps, version tout aussi monstrueuse que la mère de ce que deviendra Nina une fois sa jeunesse passée et extirpée d’elle par l’art, un beau jouet cassé. Mila Kunis enfin est un double parfait, black swan provoquant et séduisant, incarnant avec lascivité les fantasmes inavoués d’une Nina incapable d’assumer les pulsions d’une jeune fille étouffées par une mère castratrice. Elle aussi fait montre d’une belle tessiture de jeu et réussit à exister face à une Nathalie Portman absolument époustouflante.

black-swan5.jpg

C’est enfin un film qui a la force de traiter le ballet, habituellement vu comme un siège de grâce et de légèreté, en assumant toute la violence qu’il recèle et qui est toujours passée sous silence :  oui la danse fait mal, oui les danseuses façonnent leur corps dans la douleur dès la plus tendre enfance comme Nina a été façonnée par sa mère, oui la mutilation physique a sa place dans ce type d’environnement. Enfin, c’est une très belle métaphore de l’aspect vampirique de l’art qui consomme toujours plus des interprètes, qui exige non pas la perfection technique (Nina n’a pas compris qu’un artiste n’est pas un artisan) mais aussi de tout donner, d’aller au fond de soi sortir l’émotion, ses propres contradiction pour les donner en pâture au public.

 Aronofski nous montre la face cachée de l’art, comment on fabrique un chef d’œuvre, comment on émeut et le prix à payer. Vertigineux.


L'avis de Céline

Est-il nécessaire de rappeler l'intrigue de Black Swan ? (j'ai toujours l'impression d'être la dernière à aller voir les films, et le temps que je publie le billet, le film n'est même plus à l'affiche...) Une jeune femme, une jeune danseuse, Nina, vit avec sa mère une vie dédiée à son art. Dans sa chambre encore enfantine, les peluches roses parsèment les meubles, et tous les soirs, elle s'endort au son du Lac des cygnes, interprêté par une boîte à musique.

 Sérieuse, dévouée à son travail, elle est la plus douée de la troupe dans laquelle elle joue. Quand la danseuse étoile se retire, elle imagine donc être choisie pour jouer le rôle principal de la prochaine oeuvre au programme : le Lac des Cygnes. Mais, le metteur en scène demande à sa danseuse étoile une gageure : jouer le cygne blanc, pur et virginal, et le cygne noir, sombre et sensuel. Nina, toute à sa perfection technique, est-elle vraiment capable de jouer le cygne noir ?

A partir de cette histoire, Aronofski nous crée un film brillant, baroque, sombre, complexe sur lequel je pourrais écrire des pages et des pages. Mais je vais essayer de me limiter aux trois aspects qui m'ont le plus fascinée.

BlackSwan1.jpg 

C'est une splendide et douloureuse réflexion sur la création et l'Art. Le sacrifice auquel se soumet Nina, d'abord inconsciement puis en pleine face, est celui que subit chaque artiste quand il crée de la Beauté. Pour jouer le cygne noir, il n'est pas besoin de technique, mais il est nécessaire d'aller chercher au fond de soi sa sauvagerie, la sensualité dont le rôle se nourrit. Nina se torture (les grattements dans le dos, la schizophrénie) avant d'aller chercher ses tripes (au sens presque premier du terme car elle meurt d'une blessure dans le ventre) pour les exposer au public, nous même, qui nous repaissons de la beauté de l'oeuvre.

Il y a quelque chose de profondément émouvant à voir des artistes (un réalisateur, des acteurs) parler ainsi de leur travail. Car après avoir vu le sacrifice de Nina, je n'ai pas pu m'empêcher au sacrifice, aux sacrifices que ceux qui nous ont fourni ce film magnifique ont du se faire subir.

BlackSwan2.jpg

Second aspect que j'ai trouvé très intéressant : la notion de miroir déformant. Tous les lieux où se déroulent l'action sont dotés de plusieurs miroirs qui se répondent : le couloir de la maison de Nina, sa loge, la salle où les danseuses répètent, et jusqu'au métro dont les vitres reflètent l'intérieur. Or, les trois autres personnages féminins présentent des ressemblances troublantes avec Nina. Lily, bien sûr, l'autre danseuse, celle qui n'a aucun talent technique, mais la vitalité, la sensualité, l'indépendance dont manque Nina. Mais aussi Beth, l'ex-danseuse étoile, celle qui précède Nina, et celle que Nina suivra, quand elle aussi sera trop vieille pour la place. Et surtout la mère, terrible double de Nina : danseuse ratée, ayant du arrêter sa carrière pour donner naissance à sa fille, et s'occupant de la carrière de Nina comme si c'était la sienne.

Ces trois autres femmes, Nina les fantasme : elles entrent dans sa folie et sont elles aussi l'objet du délire de la jeune femme. Elles aussi sont mutilées (ou pas) par la folie de Nina, ou se transforment en monstres odieux, si bien qu'il devient difficile de savoir qui est qui, et à quel points ces trois autres femmes sont folles, ou simplement saines mais transfigurées par le regard de Nina.

BlackSwan4.jpg

Enfin, le troisième aspect concerne le sang et la virginité dans cette oeuvre. Nina est vierge : il n'est qu'à voir son regard quand le metteur en scène le lui demande. Et il est facile de supposer qu'elle ne se donne que très rarement des plaisirs solitaires (mais avec une mère qui dort dans sa chambre, ...). Nina est encore une enfant, dont les sens ne sont pas éveillés, et qui va découvrir sa propre sensualité dans le film.

Or, ce film est presque en noir et blanc, à l'exception d'une couleur : le rouge du sang. Nina saigne, souvent.Elle saigne quand elle se gratte le dos, elle saigne quand elle s'arrache les ongles, elle saigne quand elle se transperce (étonnante tâche rouge se répandant sur le linge blanc de son costume). Et quand elle tue Lily, c'est une épaisse marre de sang qui se répand. Il y aussi le rouge à lèvre qu'elle vole à Beth, les yeux du Black Swan s'injectant de sang.

Nina n'est pas que la danseuse qui souffre pour son art, n'est pas que la folle schizophrène, elle est aussi une enfant qui devient une jeune femme, qui s'ouvre à la sexualité et à l'amour. Elle repousse sa mère, pour chercher un modèle chez une autre femme mûre (Beth), à qui elle vole l'amour (ou la place comme partenaire privilégiée) du seul homme du film. Et trouve face à elle la concurrence d'une soeur jumelle, plus belle et plus femme, qu'elle jalouse. Une belle leçon de psychanalyse !

C'est un film que j'ai trouvé magistral, puissant et beau, bien que terriblement éprouvant. Violent et passionné, comme j'aime les oeuvres d'art.

Et puis, ça c'est un scénario réellement complexe et riche... Inception, à côté ... (oui, c'était ma minute peste du moment ;) )

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3 mars 2011 4 03 /03 /mars /2011 09:00

51-2BdrFpFJwL._SL500_AA300_-1-.jpgUn ami m’avais conseillé de lire Les Déferlantes alors que je lui disais que j’avais envie de lire un roman qui se passerait dans un lieu désertique et où tout serait écrasé par la pesanteur d’un soleil dévastateur. Certes point de soleil ici mais la mer pèse de tout son poids sur ce petit coin de Cotentin désolé.

Tout commence par une grande tempête, les éléments se déchaînent contre un malheureux village du bout du monde, près de la Hague, en France. Cette tempête physique ne fait que présager du cataclysme causé par le retour de Lambert qui revient sur les lieux de la noyade du reste de sa famille, des années auparavant.

Ce retour fera ressortir et poindre tout ce qui restait caché dans ce village et ses habitants, tous leurs secrets, leurs rancœurs, leurs blessures.

J’ai été séduit d’emblée par ce roman âpre et rude, par cette narratrice écorchée vive et par les personnages extrêmes et taiseux qui peuplent ce village et ce roman. J’ai aimé ce style à l’image de ce qu’il raconte, rude, brusque et bref. Les phrases sont courtes, presque crachées, le vocabulaire simple et rustre mais l’ensemble, construit un peu à la manière d’un tableau impressionniste, par petites touches brèves, dégage une indéniable force.  

C’est un roman que j’ai trouvé riche, j’ai aimé que Claudie Gallay y prenne son temps, j’ai aimé la façon dont elle a abordé ses sujets, les a liés entre eux. C’est, je pense un roman sur la déchirure, la brisure et sa rédemption, pour tant est qu’il puisse y en avoir. Tous les personnages ont à un moment ou un autre connu une tragédie qui les a brisés ou même annihilés. Tous continuent à vivre sur ce petit morceau de terre scarifié, chacun à sa manière. Comme leur village, leur lande sont balayés par les éléments, tous ces hommes et ces femmes sont courbés sous la force et le souffle de leur propre histoire.

Le silence est omniprésent, un silence oppressant qui se retire brutalement, par petites touches. Pour un ce sera la parole enfin libérée, pour un autre ce sera apprendre à laisser aller, un autre encore tente de vivre en se déversant dans son art. Tous tentent de continuer, comme ces plantes qui poussent entre les rochers battus par les vents et la mer.  

Comme une pierre, ce roman vient de loin, il s’est extirpé des profondeurs non de la terre mais de l’être humain pour venir éclore à la lumière, brut et pur mais vraiment précieux si l’on sait regarder sa beauté.

B.

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2 mars 2011 3 02 /03 /mars /2011 00:00

kingsspeech.jpg"I'm not a king. I'm a Navy officer."

Est-il vraiment besoin de rappeler l’intrigue de ce film, dont tout le monde parle en ce moment, et qui a reçu l'Oscar du meilleur film ?

Un homme bégaie. Une enfance difficile dans le Londres du début de siècle, un père tyrannique et violent, une mère glaçante, une pression trop tôt exercée sur cet enfant timide, et il bégaie.

Lui, ça ne le gêne pas tant que ça, et sa femme, une piquante anglaise pleine de charme et d’esprit, non plus. Tout pourrait en rester là, avec cet être pétrifié de terreur en public, et incapable de se sentir à l’aise ailleurs qu’en famille, s’il n’y avait un « mais » et de taille : « What if my husband was the Duke of York ? ».

Héritier du trône d’Angleterre, à une époque où la radio se développe, et où le charisme de certains les porte au pouvoir, à une époque où de sombres dangers planent sur l’Europe, et où l’Angleterre va avoir besoin d’un homme derrière lequel se ranger.

kingsspeech3.jpg

Voilà en quelques mots l'histoire de ce film, que j'ai adoré (je sais, je suis d'une originalité folle ; et c'est pas comme si je m'en doutais, que j'allais l'aimer). Il entrecroise la petite et la grande histoire avec talent.

Petite histoire dans le portrait de cet homme, Bertie, que Colin Firth incarne à merveille (à croire qu'il a un talent pour jouer les anglais renfermés, Darcyiiiiiiiiiiiii). C'est un homme assez peu aimable, que ce Bertie : arroguant, colérique, froid, orgueilleux, il ne se révèle que dans sa famille, et avec ses filles. C'est là qu'il se laisse suffisament aller pour se débarrasser de sa carapace, et devenir un père de famille tendre et souriant.

Petite histoire aussi que ses relations avec les deux seuls êtres qui l'apprécie pour lui-même : sa femme et son thérapeute Lionel Logue. Ces deux personnages sont admirablement rendus. Helena Bonham Carter campe une Queen Mom adorable et attachante, pleine de vivacité, tendre et lumineuse. Elle est "reine", jusqu'au bout des ongles, et semble être ma seule à l'aise dans ce rôle royal.

Quant à Lionel Logue, il est fantastique : à la fois rebelle, mais impressionné par le titre royal ; proche, mais gardant ses distances ; fier, mais acceptant sans broncher les humiliations que lui fait subir un Bertie pas en veine de politesse. Et sa femme, la charmante Myrtle, est une perle : sa réaction en croisant la reine dans sa cuisine est un petit régal ...

kingsspeech2.jpg

Au delà de ce trio, j'ai trouvé que ce film posait avec intelligence la question de la place de la fonction et de l'être humain, dans le personnage public : Bertie, tout à son image et à sa fonction de prince royal, en tombe malade ; mais son frère Edward, qui privilégie sa vie et ses plaisirs, ne peut être roi. Ce genre de rôle public nécessite donc un subtil équilibre entre responsabilité de la charge, et liberté de l'être humain ; rappeler cette vérité, à une époque où la personnalisation de la vie publique et des personnages politique est de plus en plus importante, me semble très intelligent.

kingsspeech1.jpg

Car, en plus de l'histoire individuelle, ce film se penche sur l'Histoire : quand la radio devient le moyen privilégié de contact entre un roi et son peuple ; quand des dictateurs au verbe haut prennent le pouvoir ; quand la guerre menace et éclate, qu'est ce qu'un pays peut faire d'un dirigeant incapable de parler ? "The nation believe that, when I speak, I speak for them ! but I can't speak."

Ce film pose la question de la forme et du fond, autre aspect de plus en plus prégnant de notre vie politique : une homme politique intelligent et capable ne vaut rien face à un orateur de talent, quelque soit ses idées. Et si un dirigeant veut rassembler autour de lui, il doit pouvoir parler, et parler avec talent.

 

C'est un film magnifique que ce King's speech, intelligent et riche. S'il pâtit peut-être un peu d'une mise en scène d'un classicisme à tout épreuve, celle-ci forme comme un écrin dans lequel le jeu des acteurs, Colin Firth en tête, se déploie.

A voir, et à revoir.

 

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1 mars 2011 2 01 /03 /mars /2011 10:00

IndianaGeorgeSand.jpgRaymon se sentit flatté d'inspirer un attachement si généreux, et la reconnaissance, la compassion, un peu de vanité peut-être, lui rendirent un moment d'amour.

 

Indiana est le premier roman de George Sand, et il est facile d'y voir une part d'autobiographie. Ce roman raconte l'histoire d'une jeune créole, mariée contre sa volonté à un homme plus vieux qu'elle et rustre. Son âme délicate attend le grand amour et, loin de le voir dans son cousin, Sir Ralph, un anglais taciturne qui veille sur elle depuis sa plus tendre enfance, elle tombe amoureuse d'un parisien beau parleur, Raymon.
Hélas, celui là est un Valmont, un Adolphe, qui se détache d'elle sitôt qu'il la possède.

C'est un roman que j'ai énormément aimé et dévoré dans la journée. Il est très finement écrit, avec beaucoup d'esprit et d'ironie, et en même temps, une grande psychologie. Les personnages ne sont ni noirs, ni blancs, mais toujours constrastés. On sent qu'elle les aime beaucoup, même Raymon qui rappelle le premier amour de George Sand, Aurélien de Sèze.
Quant à Indiana, même si elle est dépeinte sous un jour favorable, elle n'est pas parfaite, étant aveuglée par l'amour, passionnée, et globalement assez égoïste.
Un seul personnage semble monolithique : Ralph, adorateur d'Indiana handicapé par une timidité maladive.

 

Moyennant quoi, la province accompagnait toujours son nom de l'épithète de brave parce que la bravoure militaire est apparemment d'avoir de larges épaules, de grandes moustaches, de jurer fort et de mettre l'épée à la main pour la moindre affaire.

Attention, ce qui suit contient des spoilers sur l'intrigue ...

 

 C'est un roman qui m'a fait penser à plusieurs intrigues que George Sand connaissait ou pouvait connaître.
Déjà, le roman de Bernardin de Saint Pierre Paul et Virginie est cité à de nombreuses reprises dans le roman. Ralph et Indiana sont élevés comme frère et soeur, dans une île paradisiaque et tropical, et un amour nait entre eux qu'ils mettent du temps à reconnaître. Comme dans Paul et Virginie, l'histoire manque de mal se finir, avant d'être sauvée par un épilogue un chouia tiré par les cheveux. De plus, et j'y reviendrai, le thème de la Nature et du Bon Sauvage sont très présents.
Second roman auquel j'ai pensé : Les liaisons dangereuses. Même s'il y a des différences notables, le couple Raymon/Indiana m'a rappelé celui de Valmont/la présidente. Indiana est pure, infiniment pure, tandis que Valmont est un homme à femmes, qui n'aime rien tant que séduire. D'ailleurs, la pureté et l'innocence d'Indiana font partie des choses qui l'attirent chez elle. Comme dans Les liaisons, le séducteur finit par tomber amoureux de sa proie, sauf que là, l'amour ne dure qu'un temps.
Hamlet est également présent dans ce roman, avec le personnage d'Ophélia. La noyade est presque la seule manière de mourir dans ce roman ; Noun flottant entre deux eaux dans la rivière m'a profondément rappelée Ophélia. Et sans parler de la mort de la chienne chérie d'Indiana, assassinée en essayant de rejoindre sa maîtresse à la nage, qui s'appelait Ophélia !
Enfin, le trio Indiana/Raymon/Ralph m'a rappelé celui de Marianne/Willoughby/Brandon, dans Raison et sentiments. Indiana, follement romantique et romanesque, tombe amoureuse d'un homme à femmes qui la laisse tomber et l'humilie en en épousant une autre, avant de revenir vers celui qui l'aimait mais qui ne la faisait pas rêver, et avec lequel elle finit par vivre une vie paisible et heureuse. Le parallélisme est si fort que je me demande si George Sand n'avait pas lu Jane Austen avant d'écrire !!


Je sais que je suis l'esclave vous le seigneur. La loi de ce pays a fait de vous mon maître. Vous pouvez lier mon corps, garrotter mes mains, gouverner mes actions. Vous avez le droit du plus fort, et la société vous le confirme ; mais sur ma volonté, monsieur, vous ne pouvez rien, Dieu seul peut la courber et la réduire.

Bien sûr, le féminisme et la proclamation que la femme est martyrisée par l'homme, en particulier dans le mariage et les relations amoureuses est l'épine dorsale du roman. Raymon et le mari d'Indiana représentent tous les deux des tyrans qui font souffrir la jeune femme, aidés en cela par la société qui pardonne tout au séducteur, et rien à la victime.

L'autre aspect qui m'a marqué, c'est le rousseauisme du roman. La société, la civilisation, sont représentés comme les causes des malheurs d'Indiana. Raymon est un jeune homme à la mode, parisien jusqu'au bout des ongles ; c'est à Paris, à un bal qu'elle tombe amoureuse de lui, alors qu'elle n'avait eu aucun sentiment pour lui lorsqu'elle l'avait rencontré à la campagne. Même Raymon s'assagit et devient plus pur à Crecy ; c'est le retour à Paris, la compagnie de ses amis qui le rend à nouveau cruel et égoïste.
Dans un autre registre, le mari d'Indiana est lui aussi un produit de la société : c'est un ancien soldat de Napoléon, et c'est son caractère soldatesque, brutal, qui fait souffrir Indiana.
Alors que Ralph, élevé comme elle dans les îles, et insensible aux corruptions de la société, représente l'amour et la tendresse.
D'un autre côté, il y a de nombreuses descriptions de la nature, de la région parisienne ou des îles. C'est là que l'âme renait, s'épure ; c'est là qu'Indiana devient plus forte (cf. l'épisode de la chasse). C'est là aussi que les personnages malheureux trouvent la paix grâce au suicide (alors qu'Indiana, qui cherche à se suicider en se noyant dans la Seine, à Paris, n'y parvient pas).

Ce qui me mène au dernier point de ma réflexion : l'importance du suicide comme manière d'échapper à une vie triste et malheureuse. Je ne sais pas dans quel état d'esprit était George Sand lorsqu'elle a écrit ce roman, mais tous les personnages sympathiques envisagent le suicide comme seule échappatoire à leur vie ! De plus, c'est un thème qui revient régulièrement dans le roman : au début, avec le suicide de Noun ; lorsque Raymon abandonne Indiana ; et enfin, dans les toutes dernières pages, comme apothéose finale de l'amour entre Ralph et Indiana.
Alors que lorsque les personnages sont vraiment "au bout du rouleau" (lorsqu'Indiana apprend que Raymon en a épousé une autre), ils n'ont même plus la force de mettre fin à leurs jours !


En tout cas, c'est un roman que j'ai vraiment beaucoup aimé et dont je conseille vivement la lecture !

 

Lu dans le cadre du challenge Dames de lettres !

souver10

 

Lu dans le cadre du challenge Read me I'm fashion (les tenues d'Indiana ont un importance non négligeable dans ce roman)

fashionEt George Sand étant morte d'une occlusion intestinale, elle entre dans le Challenge nécrophile

deadauthor

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28 février 2011 1 28 /02 /février /2011 09:00

Blonde.jpg"Alors vint la Mort, le long du boulevard dans la lumière sépia du crépuscule."

Blonde n'est pas une biographie de Marilyn. Ou plutôt, Blonde n'est pas qu'une biographie de Marilyn.

Bien sûr, l'Actrice Blonde se nomme Norma Jean Baker, aka Marilyn Monroe. Bien sûr, les événements qui lui arrivent correspondent plus ou moins à ceux que wikipédia signalent dans la biographie de Marilyn : une mère à moitié folle, une enfance ballottée, un mariage très jeune avec un très jeune homme, la Guerre et la séparation, quelques photos à Hollywood, le cinéma qui la découvre et la fabrication de "Marilyn Monroe"©, un premier mariage avec un ex-sportif qui s'achève au bout de quelques mois, un second mariage avec un dramaturge new-yorkais qui s'achève au bout de quelques années, une liaison avec un président des Etats-Unis et une fête d'anniversaire où elle rayonne et où elle s'effondre.

Bien sûr, tout y est. Mais, de ce matériel, Joyce Carol Oates crée une fable à vocation presqu'universelle : quels sacrifices, quelles souffrance la société/les hommes/les vilains capitalistes/les "on" de tout poil demandent aux jolies jeunes filles pour devenir des icônes.

 

"Pourquoi ne lui suffisait-il pas d'être mignonne et sans détour comme les autres jolies filles ; pourquoi essayait-elle d'être profonde ?"

 

Blonde est d'abord un portrait : celui d'une jeune fille, d'une jeune femme timide et mal dans sa peau, dont l'immense beauté est une malédiction. Si belle que les femmes se méfient ; si belle que tous les hommes (ou presque) la désirent ; si belle que personne ne prend la peine d'aller au delà de sa beauté, de sa blondeur, de son air candide et de son corps voluptueux pour aller chercher au delà, l'être humain blessé ou heureux.

 

"Je n'étais ni une poule ni une pute. Mais il y avait le désir de me percevoir de cette façon. Parce qu'on ne pouvait pas me vendre autrement, je crois. Et je comprenais que je devais être vendue. Car alors, je serais désirée et je serais aimée."

 

Cette jeune fille pure jusqu'à l'extrême entame avec la célébrité une descente aux enfers, d'abord lente puis de plus en plus rapide, au fur et à mesure que Norma Jeane s'efface devant l'Actrice Blonde, que d'autres appellent Marilyn.

Je n'aime pas les descentes aux enfers d'habitude - et j'avoue que même là, j'ai du m'arrêter une centaine de pages avant la fin pour faire une pause -, mais celle là est d'autant plus admirable que c'est celle qui la subit qui en est la cause. Car, qu'est-ce qui destinait Marilyn à sombrer dans la drogue et la dépression si ce n'est une part sombre en elle, un revers de la médaille fraîche et délicate de la pom-pom girl ? N'y-a-y-il pas une parenté avec certains des héros de Zola dans cette manière dont, coûte que coûte, quelques soient les efforts et la bonne volonté de Norma Jeane, le spectre de sa mère la poursuit ?

 

"Aucun homme n'avait le droit de l'épouser et de vouloir la changer ! Comme si proclamer Je t'aime c'était proclamer j'ai le droit de te changer."

 

Blonde est également un roman de révolte : contre l'establishment, contre les hommes, contre la manière dont les puissants abusent de leur pouvoir sur les plus faibles. Tous ceux qui cotoient Norma Jeane ne veulent voir dans la jeune femme que celle qu'ils y cherchent : l'épouse parfaite de l'Ex-Sportif, la Martha du Dramaturge, la poule aux oeufs d'or du Studio, la jeune actrice prête à tout (et y compris à la prostitution) pour percer de Z ou la Poule de luxe du Président. Voulant plaire à tous, peu sûre d'elle, Norma Jeane se perd dans ces multiples facettes qu'on lui demande, ne trouvant jamais, ou presque, de sérénité. Il apparait petit à petit que sa seule fuite possible est dans la drogue, dans un sommeil sans rêve dont on ne sort que par une activité exubérante.

 

"Et là, le plus spectaculaire de tous, l'immense panneau de Niagara, dix bons mètres de large avec, en travers, la vedette féminine blond platine, corps voluptueux, beau visage provocant, lèvres entrouvertes d'un rouge humide suggestif, si fascinant que l'on plaisantais à Hollywood sur la façon dont les voitures ralentissaient ou s'arrêtaient même carrément en passant devant."

 

Et puis, il y a le désir des hommes. Le corps de Marilyn, ce corps dont Norma Jeane ne sait que faire, dont la petite jeune fille croyante a honte. Cette manière dont elle est transformée par ceux qui veulent la vendre en fantasme masculin. La manière dont les hommes la désirent, corps et âme. Cette folie qui s'empare autour de Marilyn :

"Car ce qui compte, c'est moins les paroles des gens que leur façon de vous parler sérieusement et sans subterfuge en vous regardant dans les yeux."

 

Le tout écrit avec la plume de JCO, toujours fine et percutante, juste, parfois drôle, parfois triste, mais toujours émouvante. Je finis ce billet avec quelques extraits qui m'ont frappée (mais ce long roman en est plein...) :

 

"L'Actrice essuya furtivement quelques larmes. C'était l'effet de ces paroles sincères et de la fumée âcre du cigare flottant dans sa direction."

 

"L'Actrice blonde n'était pas jalouse du besoin fraternel et et enfantin que l'Ex-Sportif avait d'hommes machos. C'était un besoin qu'elle partageait."

 

"Le but du théâtre - Aristote l'a dit le premier, et mieux que tout le monde -, c'est de susciter une émotion profonde chez le spectateur et par l'intermédiaire de cette émotion de produire une catharsis de l'âme."

 

"MARILYN MONROE était un robot créé par le Studio. Fichtrement dommage qu'on n'ait pas pu le breveter."

 

En bref, et pour résumer : un chef d'oeuvre de Joyce Carol Oates. Encore un.

lecturecommune2

Lu en lecture commune avec George !

 

Marilyn

Pour le challenge Marylin Monroe

 

oates-challenge

Et le challenge Joyce Carol Oates,

 

littératureaméricaine2011

Et le challenge Yes we can

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27 février 2011 7 27 /02 /février /2011 18:34

"Est-ce donc toujours le rôle des femmes de soutenir les maisons comme ces figures de pierre qu'on nomme caryatides ? Et vas-tu aujourd'hui, Seigneur de Haut-Mesnil, renverser sur ta tête et sur la mienne, toutes les pierres de notre grande maison ?"

 

Ce recueil de nouvelles, un peu fourre-tout ne s'appelle que par erreur "Nouveaux contes d'hiver". Car si les trois derniers contes sont effectivement à rattacher au recueil précédent Contes d'hiver, d'autres sont clairement reliés aux Sept contes gothiques, et les premiers sont tirés du roman Albondocani, que je n'ai pas lu.

Est-ce pour cette raison ? J'ai peu accroché sur les premiers. Dans une Italie un peu fantasmée, un vieux peintre, sa belle épouse et son jeune et talentueux élève vivent une sorte de ménage à trois, rompu par la mort du maître. Le jeune homme en est bouleversé, et se détache de la veuve. Même si le style en est toujours aussi merveilleux, je n'ai pas vraiment réussi à entrer dans ces nouvelles.

Par chance, dès que j'ai entamé les deux "Nouveaux contes gothiques", mon adoration est revenue.

Les caryatides raconte l'histoire d'une famille noble de la France du XIXème troublée par une sorcière, une va-nu-pieds qui séduit le fils d'une noble famille.

La secondes, L'écho, m'a encore plus plue : elle revient sur une nouvelle des Sept contes gothiques, qui mettait en scène une cantatrice ayant perdu sa voix. Suivant cette femme dans ses pérégrinations, on découvre avec elle un petit village où, dans l'église, le dimanche, un jeune garçon chante ... avec sa voix. Celle qu'elle a perdue une dizaine d'années auparavant est allée se trouver danns ce garçonnet, pour qui elle se prend d'une irrésistible amitié.

 

 

"Car, représente-toi un peu ce que ça signifie : on prend une jeune femme heureuse, innocente, confiante et, lentement, lentement, on lui arrache les dents, les cheveux, on lui décolore les yeux, on lui déforme le corps, on lui crevasse la peau, on lui casse la voix, et on la met bien en évidence, aux yeux de tout le monde comme si elle était nue."

 

Les Contes d'hiver aussi m'ont séduite.

Une histoire campagnarde est un conte plein de vengeance et de pardon. Un fils cherche à racheter la faute de son père qui, en punissant un de ses paysans, l'a conduit à la mort. Mais, il apprend que le petit-fils de ce paysan, son frère de lait, est en emprisonné pour avoir volé et tué.

J'avais déjà lu la seconde : Une saison à Copenhague, où des cousins et cousines jouent au jeu dangereux de l'amour absolu, dans une Copenhague en pleine effeverscence hivernale.

Enfin, la dernière, Conversation nocturne à Copenhague relate une discussion entre un roi, un poète et une pute, et est bouversante de beauté et de poésie.

 

Malgré son irrégularité, ce recueil a encore une fois été un délice, un ravissement.

 

Il constitue ma première participation au Challenge La Nouvelle,

La nouvelle

ma troisième a u Challenge Vicking Lit'

vikinglit

et ma dernière à la Semaine nordique !

nordique

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