Après avoir adoré Une Séparation, je ne pouvais que suivre l’actualité d’Asghar Farhadi, son réalisateur. Quand j’ai entendu au Masque que sortait en France un des films antérieur du réalisateur, j’ai sauté sur l’occasion.
Le Belle Ville dont il est question là n’est pas un quartier de Paris, mais de Téhéran. C’est dans ce quartier misérable que vivent Ala, sa sœur Firouzeh et Akbar. Deux ans auparavant, à seize ans, Ala a tué sa petite amie. A dix-huit ans, maintenant, il pourra être exécuté, pendu, conformément à ce que le père de la victime souhaite en suivant la loi du talion.
Akbar, un ami rencontré en prison, veut le sauver : dès sa sortie, il va voir Firouzeh, la sœur d’Ala, pour que tous les deux, ils convainquent le père de renoncer à sa vengeance. Hélas, le père est muré dans un chagrin que rien ne peut vaincre, si les supplications des deux jeunes gens, ni les conseils de l’imam, ni l’angoisse de sa femme, qui préfèrerait échanger cette exécution contre le prix du sang permettant d’opérer sa fille.
C’est une magnifique tragédie que ce film. De Roméo et Juliette à Antigone, des amours impossibles au poids des morts, en passant par la difficile distinction entre ce qui est juste contre ce qui est légal. Dans cette société de très petites gens, à la limite de la misère, se créent des dilemmes et des drames shakespeariens. Comment accepter qu’un père renonce à sa vengeance, légale ? Comment faire le deuil ? Comment nait un amour sur ces ruines et ce drame ?
Je n’arrive pas à parler de ce film. Les images se bouleversent devant mes yeux, les foulards colorés, les rues poussiéreuses, cette courette sombre où vit le père ressassant son chagrin, la complicité des femmes, le visage aux sages rides de l’imam. Le regard d’Akbar croisant celui de Firouzeh. Cet amour magnifique. Cette tragédie poussant sur la tragédie.
Les acteurs sont encore une fois excellents, merveilleusement dirigés. Je suis tombée amoureuse de Firouzeh, de son sourire tantôt malicieux ou tantôt fatigué, de son regard droit, des boucles de ses cheveux encadrant son front. Elle est magnifique, cette actrice. Elle porte mille émotions en un regard, mille pensées en un geste. Je veux absolument la revoir…
Je ne vois peut-être qu’un seul défaut à ce film : il est un peu trop lent ; il manque un peu de rythme. Les rebondissements de l’intrigue sont un peu trop nombreux. Mais qu’importe : on est bien avec Akbar et Firouzeh et on y passerait des mois avec plaisir.