"They told me you're a man of true grit."
Encore une fois, j'ai l'impression d'arriver après la bataille...
L'avis de Céline :
Dans un Far-West tout ce qu'il y a de plus typique (avec ses croque-morts, ses saloons, ses villes en construction et ses vautours), une petite fille se promène seule : son père est mort, assassiné par l'homme qu'il avait employé pour garder un troupeau de poneys, et elle vient chercher le cadavre. Mais la gamine ne peut pas s'arrêter là : elle veut récupérer l'argent des poneys, et elle veut surtout venger son père.
Après avoir arnaqué en beauté le vendeur de poneys (très belle réflexion sur le pouvoir de l'image, soit dit en passant), elle se met donc en quête d'un US Marshal capable d'aller arrêter Tom Chaney en territoire indien. Elle le trouve, en la personne de Rooster Cogburn, alcoolique notoire, et tombe en même temps sur un Texas Ranger, LaBoeuf, qui est à la poursuite du même homme. Et voilà les trois, l'alcoolo, la gamine et le boy scout un peu con en vadrouille dans un territoire dangereux, où les hommes tombent comme des mouches.
Je ne mégoterais pas : c'est un excellent film. Le scénario est excellent, le trio très efficace, avec une mention spéciale pour la gamine, dont les répliques sont très drôles. Alors que je ne le supporte pas d'habitude, j'ai trouvé Matt Damon totalement parfait dans ce rôle : son côté brute américaine, que e-je ne supporte pas dans la plupart des films où je l'ai vu, le rend merveilleux dans celui d'un Texas Ranger stupide (à se demander si il a eu besoin de jouer ...). Et le vieux marshal est juste merveilleux.
L'image est superbe. Certaines scènes sont des petits bijoux (celle où ils croisent le médecin recouvert d'une peau d'ours, par exemple). Et en plus, c'est drôle.
Bref, un film parfait.
Mais, je ne l'ai pas du tout aimé. Alors que les images sont relativement soft (on voir quelques cadavres et deux-trois fusillades), il a une violence en lui, psychologique, intrinsèque qui m'a rendue malade. La fin, la dernière cavalcade a vraiment été de trop, et mon empathie pour ce pauvre Blackie m'a fait haïr les frères Coen. J'ai ressenti la même chose en voyant No country for old man, et je pense que les films "sérieux" des frères Coen ne sont pas pour moi.
C'est sans doute un hommage à leur talent, mais la tension, l'inéluctabilité de la violence et la brutalité avec laquelles ils la montrent m'est insupportable.
Dommage ...
L’avis de B :
True Grit est un western atypique.
Le film s’ouvre sur l’arrivée en ville de Mattie Ross, 14 ans, une gamine teigneuse aux pieds bien sur terre, dont le père a été tué par un soudard qui s’est échappé. Mattie a de la suite dans les idées et se révèle une redoutable négociatrice dont la moindre des réussites n’est pas de s’adjoindre les services de Rooster Cogburn, un vieux Marshall acolo et tout aussi teigneux qu’elle pour aller retrouver l’assassin de son père, disparu dans un no man’s land sauvage et peuplé uniquement de desperados ou de marginaux auxquels la vie en société ne convient pas, comme il en existait encore dans le mythique ouest américain.
A Mattie et Rooster Cogburn s’ajoutera Joe Laboeuf, un Texas Ranger boy-scoutt à la poursuite du même fugitif. Le trio s’engage de plus en plus dans le cœur de ce morceau oublié de l’Amérique dans lequel ni civilisation ni loi n’ont encore pénétré. C’est là l’objet principal de ce film. Il ne s’agit pas de montrer le far west des colons, mais ce que fut l’Amérique des débuts, un monde vierge et non civilisé. Il s’agit d’un retour aux sources du mythe du far west américain, celui des desperados, des marginaux, des trappeurs un peu dérangés, ce monde dans lequel l’humain est perdu dans l’immensité de la nature sauvage et indomptée, un monde violent et vierge dans lequel seule la loi du plus fort prévaut.
De ce scénario atypique et en somme relativement peu intéressant, les frères Cohen vont aller chercher la source de ce qui fait le mythe du western pour l’étaler sous nos yeux. C’est la chronique d’un monde qui n’est plus et que seul le cinéma peut faire revivre à nos yeux.
A ce titre, le personnage de Rooster Cogburn est formidable. Il est une relique de l’ouest américain, un alcoolique complet, un homme vieux et usé qui incarne la justice mais dont les méthodes et les accointances le placent plus près de ceux qu’il poursuit que de ceux qu’il défend. S’il est évident qu’il n’est pas à sa place en ville, il est totalement dans son élément une fois la frontière de la réserve franchie, il connait chacun et est connu de chacun. Il appartient à ce monde et y introduit la jeune Mattie Ross. Pourquoi ? C’est bien là tout le sel de ce long métrage.
Mattie Ross est une drôle de gamine. Pour ses 14 ans, elle négocie comme une poissonnière et réussit à plier tous les hommes qu’elle rencontre à sa volonté, que ce soit les commerçant de la ville ou les desperados de la réserve. Elle insuffle une grande originalité au film et permet à l’humour des frères Cohen de poindre ça et là. J'ai beaucoup ris.
Mais Mattie Ross est surtout l’incarnation de l’Amérique des débuts. Elle est la déesse de tous les hommes qui appartiennent à l’immensité déserte et qui la reconnaissent pour telle. La fin est à ce titre très claire. Les frères Cohen nous montrent la virginale Amérique dans toute sa vigueur et sa verve, dans son explosion de vie puis enfin nous laisse entrevoir la chape de plomb de la civilisation, du puritanisme et de la loi.
True Grit est une percée vibrante d’allégresse et de vie dans une Amérique virginale et violente mais tellement plus séduisante que la société policée dans laquelle nous vivons aujourd’hui.