"L'industrie ne peut être sauvée que par elle-même, la concurrence est sa vie. Protégée, elle s'endort ; elle meurt sous le monopole comme sous le tarif."
Par une belle journée d’été, un ancien soldat de Napoléon, le commandant Genestas, chevauche sur une route, dans les Alpes, en Chartreuse. Il se délecte de la vision de la belle campagne ordonnée autour de lui, du travail paysan et de l’impression générale d’aisance et de bonheur.
Quel n’est pas son étonnement d’apprendre que une dizaine d’années auparavant seulement, ce lieu était dévasté par la pauvreté et le crétinisme. Et que tout ce bonheur ne tient qu’à un homme : le docteur Benassis, celui là même qu’il vient voir sous un nom d’emprunt.
Liant amitié avec le docteur, Genestas se fait expliquer la genèse du projet, comment il a été mis en place. S’ensuivent de longues discussions sur la politique, le rôle du religieux, le meilleur système politique, intercalées de souvenirs des guerres napoléoniennes, de souvenirs enthousiastes du grand homme.
Ce n’est qu’à la fin que le docteur Benassis fera sa confession et expliquera pourquoi sa vie mouvementée l’a conduit à ce trou paumé.
"Je renouvelai d'abord très-affectueusement mes visites. Si je n'étais pas tendre, je faisais des efforts pour paraître aimable ; puis je devins insensiblement poli ; un jour, par une sorte d'accord tacite, elle me laissa la traiter comme une étrangère et je cru avoir agi très-convenablement."
Précisons : j’adore Balzac. J’en ai énormément lu pendant l’adolescence et me suis régalée de sa plume acerbe et si fine. J’ai même arrêté d’en lire de peur d’avoir « tout lu » et de ne plus rien avoir à découvrir. Honoré et moi, c’est le grand amour.
Enfin, c’était.
"Admettons en France cent pairs, ils ne causeront que cent froissements. Abolissez la pairie, tous les gens riches deviennent des privilégiés ; au lieu de cent, vous en aurez dix mille et vous aurez élargi la plaie des inégalités sociales. En effet, pour le peuple, le droit de vivre sans travailler constitue le seul privilège. A ses yeux, qui consomme sans produire est un spoliateur."
Le médecin de campagne est une déception. Sur tous les plans, littéraire et idéologiques compris.
Littérairement parlant, cette histoire n’a ni queue ni tête. La volonté démonstrative qui la soutend est beaucoup trop visible et c’est lourd. Pourtant, les premières pages, Genestas qui se promène à cheval dans une campagne teintée de romantisme gothique sont pas mal. J’étais enthousiaste à ce moment là. Et puis, l’organisation en trois parties : la description du village et des bouleversements que le médecin lui a fait subir, ça passe encore ; mais l’exposé des théories politiques et religieuses conservatrices de Nono, non ; alors même la fin, une juxtaposition de confessions permettant la description de ces âmes humaines que Balzac connaît si bien, ne parvient à me réconcilier…
"De toutes les pratiques du monde, la louange est la plus habilement perfide. A Paris surtout, les politiques en tout genre savent étouffer un talent dès sa naissance, sous des couronnes profusément jetées dans son berceau."
Quel dommage, car il y a pourtant des paragraphes, des maximes, des sentences, des raccourcis brillants d’intelligence qui me rappellent pourquoi j’ai tant aimé Les Illusions perdues ou Le père Goriot. Quel dommage, oui …
Lu dans le cadre du challenge Balzac
Et dans le cadre du challenge Romantique