"C'est comme si Antigone était déjà à Exarcheia"
Sur une scène dépouillée, une femme se prend la tête entre les mains, et dans un mouvement saccadé semble se taper la tête contre le vide ; dans le fond, passe des images de la campagne grecque éternelle, des chèvres et du calcaire.
Août 2010, une troupe de théâtre italienne séjourne à Athènes, en essayant de monter Antigone ; 6 Décembre 2008, un jeune garçon de 15 ans, Alexandros, est tué par les forces de police dans le quartier pauvre d'Exarcheia, déclenchant les émeutes qui feront trembler la Grèce.
Enquêtant sur les rapports entre révolte et autorité à la lumière du mythe d'Antigone, la troupe italienne Motus nous présente une redécouverte de la pièce, belle et forte, et d'une actualité brûlante.
Où sont les Antigone ? les Etéocle ? Qui sont les Créon ? Que veut dire résister ? Témoigner ? Se battre ? Se souvenir ?
C'est à la lumière de petits films amateurs dans les rues en révolte d'Athènes, éclairées à la lumière orange des réverbères, des cris universels de la lutte et de la révolte, que se cherchent les réponses à ces questions.
Mais cette pièce n'est pas une dissertation aride et la scène du Théâtre de la Villette une tribune politique : cette pièce est belle. Foudroyante et puissante.
Une table s'enflamme sous les discours de rébellion d'Antigone et d'Etéocle, illuminant la salle de sa clarté vivante et dorée ; et quand les flammes refluent, Créon parle, tandis que l'obscurité revient. Etéocle-Alexandros tombe, blessé à mort, une fois, deux fois, mille fois, avec grâce et douleur, de plus en plus vite, comme dans une rage de mourir, sur le carré bleu représentant Exarcheia.
C'est l'article du Monde qui m'a donné envie de voir cette performance politique, qui malheureusement ne se joue plus (on a du aller à la dernière ou à l'avant-dernière). Mais elle tourne en Europe( à Rome en Mai, par exemple). Alors, si vous avez l'occasion, foncez !