J'ai craqué. Je ne sais pas ce que j'ai fait ... C'est grave, ma PAL va en prendre un coup (mais elle s'en relèvera, je lui fais confiance) : je me suis inscrite au Read-a-thon d'Octobre (le mini, quand même, parce que voilà ... On verra l'an prochain pour le grand).Voilà. C'est mal : se réserver 12h de lecture. Oublier tout le reste... Si ça, c'est pas égoïste !
Je ne sais pas encore ce que je vais lire. J'attends de voir les minis défis qui sortent. Mon objectif serait quand même de faire baisser ma PAL, je ne compte donc pas acheter grand chose pour cette occasion.
Je pourrais peut-être lire une des lectures communes que George et moi lançons : en plus de Daniel Deronda (pour le 11 Novembre), nous allons lire La vie de Marianne de Marivaux pour le 30 Octobre et Blonde, de Joyce Carol Oates, pour le 30 Novembre.
Si vous voulez participer, prévenez moi en commentaire !
Edit : Penelope se joint à nous pour Daniel Deronda.
Sur le reste de la blogosphère, ce fut une semaine dédiée à la fantasy !
D'abord, le Middle Earth Challenge a pris son envol, avec la lecture commune du Silmarillion : les posts ont déferlé sur la blogosphère (comme la variole sur le bas clergé breton, dirait ma grand-mère...). Pour fêter ça, je vous propose d'aller voir le billet d'Aidan célébrant la création d'une police elfique pour ordinateur.
Toujours sur la fantasy, je vous conseille d'aller les 70 pages du Livraddict mag : nos amis de Livraddict se sont surpassés avec ce magazine très complet dédié uniquement à ce thème. C'est passionant, bien écrit, ça fait très bobo à la LAL (J'ai déjà noté Le Royaume de l'été, de Jame H. Hetley ; La voie du sabre de Thomas Day ; Trois coeurs, trois lions, de Paule Anderson), et en plus, c'est beau. Que demander de plus ? Une publication papier, peut-être ;) !
Bravo à tous !!
Avec l'automne, la saison des SWAP revient, avec le SWAPFrissons en noir et blanc de Canel, dédié au polar scandinave, et le SWAPSteamswap de Loula sur la littérature Steampunk ; celle des challenges commence : Galleane déclare la mort de la PAL avant Noël, en lançant son défi En attendant Noël, tandis que Leeka nous lance à la découverte de la Belgique avec son challenge Belge ; Vous avez vu comme je résiste ? Je suis forte, je m'impressionne ...
Avec la rentrée littéraire, les prix littéraires sont de retour : Do nous donne le calendrier. J'avoue que je ne les suis pas vraiment et que le seul que j'attends avec impatience, c'est le Prix Nobel, qui a souvent été source de vraies et belles découvertes.
La semaine dernière, s'est tenu le pique nique de la blogoboule. J'aurais bien aimé y aller, mais par un effet du hasard, je n'ai vu la date que 3 jours avant, et mon week end était déjà pris ! C'est raconté là par Caroline...
Phooka nous donne les lauréats du Prix Elbakin (que des auteurs que je ne connais pas...), et Lelf y joint ceux du Prix Rosny aîné (que je ne connais pas mieux), Cédric nous ressort des vieilles séries de sa jeunesse, du temps où les vampires étaient vraiment méchants, C'est la gène déboîte le cinéma français (c'est méchant, comme souvent, mais c'est drôle, comme toujours), Acr0 nous donne les sorties de fantasy du mois de Septembre, et Solenn les sorties poches de Septembre, Andrew Reid se demande pourquoi on laisse parfois des trilogies de fantasy traîner en longueur, Aventures hétéroclites nous convie à la découverte de Manet, A. C. de Haenne nous informe de la reprise de la radio salle 101(que je vais m'empresser de découvrir), Celtic Twilight nous parle de la nouvelle initiative d'Arcade Fire, Bambi Slaughter inaugure sa catégrorie "Auteur du mois" avec Jens Lapidus, Folio SF fête ses dix ans, nous informe Phooka, et offre un recueil de nouvelles pour l'achat de deux Folio SF (et comme les trois ajouts de ma LAL susmentionnés sont en Folio, je sens que je vais craquer), Heclea a beaucoup écrit cet été, pour le site Fresh'nFashion et nous donne ici les liens vers les (trop courts) articles qu'elle y a publié !
"Vous avez tous la poésie en vous. Vous n'avez qu'à la libérer."
L'avis de Céline
Mija est une vieille dame proprette et guillerette. Toujours vêtue de robes à fleurs, portant chapeau et foulard blanc, elle parcourt les rues de cette petite ville de province avec entrain, pour aller s'occuper du vieillard chez qui elle fait des ménages ou à un rendez-vous chez le médecin.
Lorsque le film commence, trois événements se produisent : elle apprend que ses pertes de mémoire sont dues à la maladie d'Alzheimer ; elle s'inscrit à un cours de poésie, où elle va s'entraîner à regarder la beauté du monde, à la rechercher, même dans des piles d'assiettes sales ; et son petit fils, dont elle s'occupe, une immonde chose mutique et désagréable (un ado, quoi), va être accusé de viol collectif sur une de ses camarades.
Suite au suicide de la jeune fille, les pères des autres gamins impliqués tentent de faire chanter la maman de la victime en la payant pour qu'elle ne porte pas plainte. Mija, droite et honnête, ne comprend pas cette pratique, pas plus qu'elle ne comprend le manque de réaction et de remords de son petit fils, bâfrant des chips devant la télé.
Elle s'abîme dans la contemplation d'une pomme ou d'un arbre, au lieu de chercher l'argent dont elle manque cruellement pour le chantage ; elle s'essaie à la rédaction de poésies en allant à ses rendez-vous médicaux ; elle cuisine pour son petit fils ; elle lave son patron, et lui permet même "d'être un homme pour la dernière fois" (splendide et émouvante scène d'amour entre ces deux vieilles personnes).
Tout en finesse, tout en nuances, Lee Chang-Dong trace ce portrait de femme, perdue dans un monde qui change, où ce qui est droit, beau et juste se réfugie dans des cours de poésie ; où les violeurs de jeunes filles échappent à la prison ; où les pères payent pour laver l'honneur terni de leurs fils ; où les ordinateurs restent sans cesse allumés et où on change de téléphone tous les ans. Finalement, l'oubli et la maladie valent mieux que le souvenir et le présent.
Mija est une très belle femme : toute bonté, générosité, humour et compassion. C'est la grand mère qu'on voudrait avoir, qui cuisine sans cesse, en pensant que la plus belle chose qu'elle puisse voir c'est "son petit fils manger", toujours gaie, jamais aigrie, malgré une vie que l'on devine difficile. Elle prend la vie comme elle vient, et en tire le meilleur et le plus beau. Elle est merveilleusement jouée par Yoon Jung-Hee, qui lui donne force et douceur : dans un film où peu de choses sont dites, où les émotions passent par les regards et les gestes, cette actrice apporte une réelle profondeur à Mija. En particulier, j'ai été très touchée par une des scènes finales, quand la police emmène son petit fils : le regard échangé entre le garçon et sa grand-mère est de toute beauté, et donne un sens à tout le film.
Le réalisateur s'attarde dans la contemplation des paysages et des choses, laissant le soleil jouer longuement sur une pomme, ou la pluie tomber sur un carnet. Il prend son temps et nous laisse déguster avec lui la beauté charnelle des images. De la cuisine de Mija à la ferme où habitait la petite victime, de la salle de cours à la chambre du vieillard, tout apparait comme de la poésie à l'état brut (ce qui m'a fait souvent penser aux oeuvres de Miyazaki, d'ailleurs ...). Plus que l'histoire, plus que la dénonciation d'une société qui apparaît comme sauvage et brutale, c'est ce temps donné à la contemplation qui donne tout son prix au film.
L'avis de B.
Le film s’ouvre sur de l’eau en mouvement, un fleuve qui charrie le cadavre d’une jeune écolière. Nous croisons ensuite Mija, une vieille femme charmante, souriante, pimpante dont le médecin, consulté sur une gêne bénigne à l’épaule, va entrevoir les premiers symptômes d’un Alzheimer précoce. Nous allons suivre cette femme tout le long du film, aller s’occuper du vieil homme impotent encore plus âgé qu’elle dont elle s’occupe et fait la toilette, même aller jusqu'à lui faire l'amour pour qu'une dernière fois il soit un homme (après avoir refusé violement une première fois et avoir ensuite compris la douleur et la beauté de cette requête d'un homme dur et colérique qui l'aime) faire la nourriture pour son infect petit fils dénué de toute émotion, aller prendre des cours de poésie avec elle pour apprendre à écrire un poème, tenter de trouver l’inspiration pour saisir quelques mots dans son petit carnet, aller à des lectures de poésie, apprendre que son petit fils est un violeur et que la jeune fille qui s’est suicidée était sa victime, qu’il la violait avec sa petite bande de copains depuis 6 mois…
Nous allons voir avec elle les pères de ces sales petits violeurs l’approcher pour discuter d’une somme à verser à la mère de la victime pour acheter son silence (30 000 000 Won soit moins de 20 000 euros, le prix d’une jeune fille en Corée).
Que dire de ce film ? Rien n’est vraiment beau à part ce personnage de femme merveilleux, mais comme nous suivons son regard, nous arrivons petit à petit à déceler la beauté là où elle est cachée. Nous allons trouver cet arbre en pleine rue beau car elle s'est arrêté pour le regarder et l'écouter parler (sa voisine repart interloquée de cette réponse), écouter les oiseau avant d'aller voir la salle de classe dans laquelle la malheureuse a été violée pendant 6 mois, trouver de la beauté dans la vaiselle dégueulasse dans l'évier, marcher dans la campagne, faire l'amour à ce vieil impotent aidé au viagra car c'est pour lui un acte d'un indiscible beauté... Vous rappelez-vous du joujou du pauvre de Baudelaire ? Poetry est une adaptation magnifique de ce poème.
Le film est lent mais beau, savoureux, aucune scène n’est inutile, chaque moment est important ne serait-ce que par sa futilité, sa légèreté. Nous comprenons très vite que nous passons du temps avec une femme d’exception. Elle n’a rien que de très quotidien mais elle est une femme que nous voudrions tous rencontrer, avoir pour grand-mère. Elle donne tout à un monde qui lui prend tout sans rien lui donner d’autre que les petites parcelles de beauté qu’elle saura petit à petit y trouver en tentant de trouver l’inspiration, en tentant de libérer la poésie qu’elle a en elle. Ce film est la quête de cette femme pour écrire son poème. Il contient de réels moments de grâce comme la scène où elle doit aller proposer l’argent à la mère de la petite suicidée et, oubliant la raison de sa présence, échangera quelques mots sur les abricots qu’elle a ramassé en chemin, ou la scène avec l’inspecteur de police, une vraie belle scène de cinéma comme on n’en voit pas si souvent.
Cet inspecteur de police est d’ailleurs important. Il apparait dans le club de lecture de poésie en lisant des poèmes de deux lignes et faisant des blagues grivoises. Mija va même aller jusqu’à dire de lui qu’il insulte la poésie. C’est la seule fois où son regard sera pris en défaut car cet homme est une très belle personne, d’ailleurs la seule qui comprendra Mija, qui lui donnera sa main et un peu d’amour le temps d’une scène magnifique dans laquelle il reprendra simplement pour quelques échanges la raquette de badminton abandonnée par son petit fils, emmené par la police.
Enfin, comment parler de ce film sans évoquer Yoon Jung-Hee, l’interprète de Mija ? Elle porte comme une plume le poids entier de ce film sur ses frêles épaules. Je ne peux même pas dire qu’elle l’interprète avec brio, que sa performance est époustouflante car il n’y a pas de performance, pas de brio, pas d’acteur, juste Mija, juste cette femme que nous suivons dans son quotidien. Je ne peux même pas imaginer que derrière Mija se cache une autre femme avec une autre vie.
J’ai été enchanté, charmé, ému par ce film. Courez-y !
"Je marche, je marche ainsi qu'au temps d'Oedipe, sans savoir où je vais, comme si son vaste dos me précédait toujours et que son pas rythmait encore le cours vacillant de mes pensées."
Je suis sous le choc de cette lecture : le mythe d'Antigone est l'un de ceux qui me touchent le plus, et le lire, traité de manière aussi brillante, m'a encore une fois bouleversée.
Contrairement à Sophocle ou Anouilh qui font commencer leurs pièces après la mort d'Etéocle et de Polynice, Bauchau fait de la lutte fratricide le centre de son récit. Il débute peu après la mort d'Œdipe, quand Antigone quitte les amis qui l'avaient recueillie à Athènes pour rentrer à Thèbes auprès de ses frères. Elle veut arrêter le combat avant le drame, mais elle sera prise contre sa volonté dans la lutte amoureuse que se livre ses deux frères jumeaux. Elle finira par prendre la défense des plus faibles, du peuple thébain assiégé, affamé, des soldats de toute factions blessés et mourants.
Ce livre tient vraiment par la galerie de portraits qu'il porte : Antigone, femme-poète, victime expiatoire, adulte jusqu'au bout de ses choix (ce qui la différencie tellement de l'Antigone adolescente d'Anouilh) ; Ismène, fleur fragile et forte, aussi combative que sa soeur, mais plus clairvoyante, déjà tournée vers l'avenir ; Etéocle, le frère d'ombre, sage, obscur, attentionné, d'une intelligence ciselée ; et Polynice, royal, brillant, lumineux dans sa fougue.
L'affrontement entre les deux frères est admirablement décrit. Je laisse Henri Bauchau faire parler ses deux protagonistes à ma place :
" ' Polynice en ce moment souffre autant que moi. Je l'ai attiré dans ma nuit, je ne puis, je ne pourrai plus jamais rien pour lui. Dès l'aube il recommencera à rayonner et à emplir l'existence de son rire. Mais je l'ai blessé et il sait maintenant que, pour lui aussi, la nuit existe.' "
"Etéocle m'a volé le trône de Thèbes, nous nous faisons la guerre, c'est bien naturel. Nous nous combattons, nous nous faisons souffrir mais nous vivons fort, beaucoup plus fort. Il me porte des coups superbes, profonds, inattendus, je fais de même. Pense à Nuit, à Jour, que tu vas lui ramener, à tout ce que cela représente de pensées ardentes et de tendues vers l'autre, dans la joie de trouver, de vaincre ou de s'égaler."
Mais au delà de cette lutte entre frères, se situe une lutte entre les frères et les sœurs, qui rappelle le dilemne d'Achille : vaut-il mieux une vie dense, lumineuse et brève, ou une vie obscure, paisible et longue ? Les deux soeurs, les deux femmes, rejettent la guerre et toutes ses souffrances ; elles soignent, apaisent, nourrissent, réparent. Les deux frères se battent pour la beauté de la guerre et de l'affrontement. J'ai rarement vu ce dilemne aussi bien décrit que dans ce roman...
"Je pousse un nouveau cri pour appeler ceux qui donnent. Je voudrais moi aussi vivre plus longtemps. Je ne connais rien de plus beau, je ne connais rien d'autre que vivre. Les gens viennent, ils souffrent parce que je pleure. Ils me donnent beaucoup, ils croient que je pleure sur les malheurs et les malheureux de Thèbes. Je ne les oublie pas, mais aujourd'hui je ne puis pleurer que sur moi-même."
Et la place de l'art ... Car que sont ces êtres héroïques sans aède pour chanter leurs exploits ? Sans sculpteur ? Sans peintre ? Traînent autour d'Antigone, qui, héroïne et artiste, fait figure de pont entre ces artistes et les princes de Thèbes, toute une série d'êtres doux, compatissants et talentueux. C'est grâce à eux que la jeune femme atteindra la vie éternelle.
"Ils ne voient plus ni l'un ni l'autre, ils se touchent, elle voit comme moi qu'ils s'ouvrent les bras. Elle entend, comme moi, Etéocle qui dit : 'pourtant frère je t'aimais.' Et Polynice : 'Moi aussi je t'aimais.' "
J'ai profité de la rentrée pour faire du tri dans ma PAL, noter les titres et compter les bouquins qui s'entassent sur les deux étagères (avec une tentative réussie pour envahir la troisième) : 104 livres. Soit, soyons pessimistes, 15 de plus que l'an dernier ; ou, soyons optimistes, au rythme où je vais, environ (seulement) un an de lecture.
Hum hum. Pas très gai, tout ça.
Pourtant, j'ai essayé d'être raisonnable, cette année : arrêter les descentes quasi hebdomadaires en librairie (ce qui fait que quand j'en fait une, je suis trois fois moins raisonnable), ressortir des bouquins de ma très vieille PAL (merci l'objectif PAL d'Antigone !), acheter moins de magazines pour avoir plus de temps pour de vrais bons romans.
L'avantage, c'est que l'incursion dans vos blogs n'a pas été une catastrophe PALesque (seulement quatre de plus), et que ma PAL a tenu le coups malgré les nombreux bouquins offerts lors de mon anniversaire ou à Noël (l'agréable conséquence de tenir un blog de lecteur : la famille et les amis offrent plus facilement des bouquins !).
Il va donc falloir faire quelque chose :
1/ Si vous voyez dans cette PAL des lectures communes potentielles, faites moi signe dans les commentaires ;
2/ J'ai remarqué que je pouvais quasiment faire la totalité de l'ABC Challenge avec juste ce qu'il y a dans ma PAL (il ne me manque que le U et le X);
3/ Comme vous pouvez le voir, il y a pas mal de livres politiques ou d'histoire politique dans cette PAL, ce qui me donne une idée de challenge qui se terminerait en Mai 2012 ;
4/ Et si, dans un an, la situation est toujours aussi catastrophique, utiliser les grands remèdes : interdiction d'acheter !
Quoiqu'il en soit, j'aimerais redescendre à un nombre raisonnable de livres dans ma PAL. Disons que diviser par deux sa taille d'ici Septembre 2011 serait une excellente chose !
Je me lance donc mon propre défi Demi-PAL : obtenir une PAL de 52 bouquins, ou moins, en comprenant donc les livres présents dans ma PAL aujourd'hui, mais également achetés/offerts d'ici Septembre 2011 (nan parce que sinon, je me connais, je vais me créer une "nouvelle PAL", à base d'achats incontrôlés pour compenser ...)
Cependant, seuls ceux présents dans la liste aujourd'hui auront droit à cette petite icône :
(image initiale provenant du blog d'Emmanuel Lemaire)
En plus de cette décision PALesque hyper courageuse (m'enfin, c'est le genre d'objectif qu'il est courageux d'énoncer et héroïque de suivre), l'année s'affirme sous de bons auspices. Par exemple, la programmation de la Comédie Française. J'ai été faire un petit tour sur le site, et j'en ai tiré quelques pièces qui me poussent à prendre cette année un abonnement : L'Avare, pour y emmener ma nièce ; Les Oiseaux d'Aristophane ; Andromaque de Racine ; Agamemnon de Sénèque et Les Trois Soeurs de Tchekov. Mon année va se dérouler sous des auspices autiques ...
Par ailleurs, cette année, nous sautons le pas et nous prenons un abonnement illimité pour le cinéma, ce qui nous aidera sans doute à avoir un peu plus d'éclectisme dans nos choix. On verra ce que ça donne (parce que l'Automne n'a pas l'air riche en bons films, je dis ça, je dis rien) ...
Accessoirement, j'ai aussi regardé les expos, et j'ai repéré pas mal de trucs qui me bottent. Fleuve Congo, Art d'Afrique centrale, au Quai Branly, jusqu'au 3 Octobre, par exemple, me donnerait l'occasion d'entrer enfin dans ce musée...
A la Crypte Archéologique du parvis de Notre-Dame, il y a une présentation des monuments de Lutèce, avec reconstitution 3D et tutti quanti. Voilà qui va ravir la passionnée d'archéologie et de Paris que je suis ! (suis-je la seule à penser que le passé gaulois et latin de Paris n'est pas assez mis en valeur ?)
Le Grand Palais présente une exposition Claude Monnet, mais comme d'habitude, il va y avoir 5 h de queue, et je ne vais donc pas y aller ...
Le Louvre se spécialise plus sur le XVIIIème, avec une expo Le Louvre au temps des Lumières (11/11/10 - 07/02/11), et une expo l'Antiquité rêvée au XVIIIème (02/12/11- 14/02/11). De toute manière, je compte reprendre une carte jeune au Louvre cette année, ne serait-ce que pour zapper la queue.
Par ailleurs, un projet me tient à coeur depuis quelques temps : visiter tous les musées de la Ville de Paris. D'autant plus facile à faire qu'ils sont gratuits (pour les collections permanentes) !
A quatre mois de la fin de l'année, je voulais faire un point sur les défis dans lesquels je me suis lancée...
Pour la plupart des défis se terminant en Décembre 2010, on peut dire que j'ai bien avancé, voire même largement dépassé les objectifs !
Ainsi, pour le défi Lire en VO !, j'en suis à 16 livres sur 12 - et encore, je n'ai même pas compté les 5 volumes de A song of ice and fire ... Mais c'est un pli qu'on prend vite ; de plus, WH Smith est l'une des rares librairies ouvertes le Dimanche et comme elle ne vend que des livres en anglais, ma PAL a tendance à s'accroître d'autant !
Pour le défi English classics, j'ai là aussi dépassé le (modeste) objectif, puisque j'en suis à 9 (pour 2). Mais je suis tellement en adoration devant la littérature anglaise, si riche, si variée, si plaisante, que je vais encore continuer pendant quelques mois !
Pareil pour la littérature américaine, que le défi Yes we can ! m'a permis de découvrir : je ne sais plus si je me suis inscrite pour 5 ou 10 romans, mais j'en suis déjà à 7. Les 3 volumes restant viendront bien vite, car j'ai Le bruit et la fureur de Faulkner, Cité de verre, de Paul Auster et This size of Paradise, de Fitsgerald, Blonde de J.C. Oates, Les sorcières de Salem, d'Arthur Miller dans ma PAL... Ce challenge est une vraie réussite car il m'aura permis de sauter le pas et de découvrir une littérature qui ne m'était pas familière ! Merci !!
J'avance bien également dans le challenge Littérature XVIIIème de Canthilde : J'ai déjà lu 4, sur les 6 livres nécessaires (Moll Flanders arrive très prochainement) ; et j'ai La vie de Marianne de Marivaux, Pamela de Richardson, ainsi que Regrets sur ma vieille robe de chambre de Diderot dans ma PAL. J'aurais découvert des oeuvres inconnues, grace à ce challenge, j'aurais vaincu des dégoûts, ressorti des livres des profondeurs de ma PAL, et découvert une période littéraire très particulière.
Mon bébé challenge Ich Liebe Zweig est fini, avec La confusion des sentiments et Trois poètes de leur vie (critique à venir très prochainement) ; mais je compte bien continuer à lire du Zweig, dans ou hors le cadre de ce challenge, car j'ai Clarissa, Le monde d'hier, et Trois maîtres dans ma PAL. A suivre, donc ...
Mon challenge perso, le défi Mythes et Légendes, a bien commencé (et est même fini, car j'ai les trois lectures que je m'imposais) ; cependant, je compte bien continuer car j'adore ces romans issus de la mythologie et j'aime les textes légendaires...
Le challenge Lunette noires sur pages blanches a été moins bien rempli, avec seulement un livre/film lu/vu. Je n'ai pas accroché sur ce challenge, ne chroniquant pas les films que je vois en DVD ; et ayant souvent du mal à trouver les livres dont les adaptations sont tirées avant la sortie du film.
D'autres challenges avancent plus doucement, comme le challenge Daphnée du Maurier, avec seulement Mary Anne de lu pour l'instant. Je n'ai plus rien d'elle dans ma PAL pour l'instant, mais je compte bien y remédier prochainement !
Je n'ai lu que deux romans de JC Oates depuis que je me suis inscrite au challenge Oates (dont seulement un est chroniqué pour l'instant) ; mais Blonde m'attend toujours sur ma PAL !
Enfin, le challenge épistolaire est à peine entamé, avec la lecture de Rousseau. D'autres livres, déjà cités, dans ma PAL me permettront de le finir sans même m'en apercevoir !
D'autres enfin n'ont même pas commencé, comme le challenge Dickens, le challenge Wharton (mais je m'interdis les descentes en librairie ...), le challenge Virginia Woolf, le challenge Bloomsbury, le challenge Vicking Lit'ou le challenge Three Christies for Christmas... Mais ça ne va pas tarder : mes prochains achats comporteront forcément un ou deux Wharton et quelques Christies !
Pour suivre mes défis au jour le jour (ou presque), c'est là.
"Et il sortit, couvert d'une armure noire, et il se dressa devant le Roi comme une tour couronnée d'acier, et son immense bouclier noir sans blason jetait l'ombre d'un nuage d'orage. Sous cette ombre, Fingolfin semblait comme une étoile, sa cotte de mailles était incrustée de cristaux, et Ringil, son épée qu'il brandit, brillait d'un éclair glacé."
Whouahou, la baffe ! J'avais oublié à quel point Tolkien écrivait bien, à quel point son univers était riche et enchanteur, sa langue poétique. J'ai été emportée !
Le Silmarillion est constitué de cinq chants : l'Ainulindalë, le Valaquenta, le Quenta Silmarillion, l'Akallabeth et Les Anneaux du Pouvoir et le Troisième Âge, le Quenta Silmarillion étant de très loin le plus long.
L'Ainulindalë raconte la création de l'Univers. A l'origine, il n'y avait qu'Eru, que les elfes appellent Iluvatar, qui créa les Ainur, les bénis. Un jour, Iluvatar rassemble tous les Ainurs et leur fait chanter un chant choral, une Grande Musique. Mais, l'un des Ainur, Melkor y mêle des thèmes personnels, créant une dissonnance. A plusieurs reprises, Iluvatar cherche à retrouver l'harmonie, mais sans y parvenir. Il finit par mettre fin au chant, et montre aux Ainurs ce que leur voix a créé : Arda, la Terre, et les enfants d'Iluvatar, les Elfes et les Hommes. Iluvatar donne corps à cette vision, et certains des Ainurs décident de descendre sur Arda pour y préparer l'arrivée des enfants d'Iluvatar ; ceux là, on les nomme les Valars. Mais Melkor descend aussi, et se mêle de détruire tout ce que créent les Valars.
Le Valaquenta décrit plus spécifiquement les Valars, leurs personnalités propres, ainsi que celle des Maiars, leurs serviteurs.
Le Quenta Silmarillion est impossible à résumer. Il raconte l'histoire d'Arda lors du Premier Âge, et en particulier l'arrivée des Elfes, et leurs pérégrinations entre la Terre du Milieu et Valinor (pas très sympas, d'ailleurs, les Elfes... Ils sont bien descendus dans mon estime !). L'un d'entre eux, Fëanor, doué et orgueilleux, crée trois bijoux, trois Silmarils, qui enferment la lumière des Arbres de Yavanna. Ces bijoux sont volés par Melkor, et Fëanor fait jurer un serment à ses nombreux fils, de ne jamais s'arrêter tant que les Silmarils ne leur seront pas revenus, serment à l'origine de tout un tas de problèmes. C'est au sein du Quenta Silmarillion que se trouve l'histoire de Beren et Luthien, si souvent citée dans Le Seigneur des Anneaux.
L'Akallabeth se passe au Deuxième Age et est tourné vers l'île de Numénor et ceux qui y vivent, des Hommes particuliers, les Dunedains. Leur île est parfaite, créée par les Valars, et les Dunedains vivent vieux et heureux. Mais Sauron, serviteur de Melkor, leur inspire la jalousie de l'immortalité des Elfes, et le désir d'aller à Valinor. L'alliance entre Sauron et le dernier roi des Dunedains, Ar-Pharazôn, ne concerne heureusement pas tous les Dunedains, et certains restent fidèles, autour d'Elendil et ses fils, Isildur et Anarion. Lorsque les Dunedains menacent d'attaquer Valinor, Iluvatar engloutit l'île, et modifie profondément la Terre, mettant fin au Deuxième Âge. Seuls s'en sortent Elendil et les siens.
Enfin, Les Anneaux de Pouvoir raconte l'histoire du Troisième Âge, la création des Anneaux de Pouvoir par Sauron, de l'Anneau Unique, l'arrivée des Istari et en particulier de Gandalf, ainsi qu'un très bref résumé de l'intrigue du Seigneur des Anneaux.
"Ce fut une terrible épreuve et même la vaillance de Glorfindel aux cheveux d'or, le chef de la Maison des Fleurs d'Or de Gondolin ne les aurait pas sauvés si Thorondor n'était pas venu à leur secours juste à temps."(dédicace à Loutre, si jamais elle passe par là ...)
Ce fût un grand moment de bonheur. Je ne m'attendais pas à ça ; j'avais commencé le Silmarillion peu de temps après avoir refermé le Seigneur des Anneaux, il y a presque dix ans. J'avais été rebutée par la trop grande richesse de ce texte, les multiples noms de chacun des personnages dans les différentes langues ; les noms des Peuples Elfes, les différents noms des Terres, etc. Mais en se concentrant un petit peu plus, en s'aidant du lexique et des arbres généalogiques dressés par le fils Tolkien, l'histoire coule plus facilement, et on peut se rendre compte de la force littéraire et mythologique de ce texte.
Car c'est d'abord et avant tout la création d'un Univers, d'un corpus mythologique hallucinant. Certes, on reconnait parfois des inspirations venues de religions existantes (l'Ainulindalë m'a fait énormément penser aux débuts de l'Ancien Testament, par exemple). Mais globalement, c'est tout un système mythique original qui se déploit devant nos yeux, avec sa cohérence, sa logique, ses disgressions et son côté épique.
Un grand grand grand texte !
Lu dans le cadre du Middle Earth Challenge
Et rentre également dans le Challenge Mythes et Légendes.
La seconde exposition que nous avons été voir concerne une région dont je connais encore moins l'histoire que l'Arabie Saoudite : le Soudan.
Entre le 3ème siècle avant JC et le 4ème siècle de notre ère, s'est développé entre les rives du Nil bleu, du Nil et de l'Atbara, dont la capitale était Méroé. A cette époque, l'Egypte était sous domination grecque puis romaine : ces trois civilisations, surtout la première d'ailleurs, ont nourri l'art de Méroé.
Cet empire, qui succède au Royaume de Napata, a été créé par le roi Arkamani Ier : c'est le premier à se faire enterrer dans une pyramide au sud de la cité, où ces successeurs ont concentré leurs constructions. C'est une monarchie centralisée, qui regroupe des peuples aux modes de vie divers, des agriculteurs sédentaires, comme des bergers. Le roi est un homme, nommé qore, et représenté habillé de vêtements richement ornés, d'un bonnet kouchite, d'un manteau, d'un châle et d'un bandeau porté en bandoulière et orné d'un pompon (tout est dans le pompon !)
Une reine, appelée Candace, peut parfois recevoir le pouvoir...
La civilisation méroïtique s'inspire énormément de la culture égyptienne. Des dieux, comme Amon, Isis ou Osiris , font partie du panthéon, à égalité avec des dieux hérités des civilisations antérieures : Sebioumeker le dieu roi, Arensnouphis le dieu chasseur, Masti le dieu Soleil, Apedemak et son épouse Amesemi.
Les pratiques funéraires sont multiples, de l'enterrement sous tumulus pour les petites gens, jusqu'à la construction de pyramides somptueuses, inspirées de l'Egypte, pour les rois.
L'autre aspect très intéressant de cette civilisation, ce sont ses écritures. Elle en possède deux, une écriture cursive pour les usages quotidiens et une écriture hieroglyphique pour les textes sacrés. Elles sont composées de signes provenant de l'égyptien ancien, mais ne possèdent que 24 caractères et fonctionnent de manière syllabique, comme le grec ou le latin. Bien qu'elle soit déchiffrée, elle n'est pas encore traduite, même si elle se rapprocherait de langues encore actuellement parlées dans certaines régions du Soudan.
L'empire disparait au 4ème siècle, après un déclin d'une centaine d'années, se traduisant par des bâtiments royaux moins somptueux. Finalement, les pressions exterieures finissent par démanteler cet empire. La culture sombre à son tour, sous l'influence du christianisme, avant d'être redécouverte au XIXème siècle.
Cette toute petite exposition, très bien faite (pour une fois, je dirais ... ), m'a permis de découvrir cette culture qui m'était avant complètement inconnue. Les traditions égyptiennes y sont retravaillées à l'aune de cultures ancestrales : c'est un merveilleux mélange qui s'établit là, avec des panthéons qui cohabitent sans aucune difficultés.
A méditer ...
Toutes les images sont tirées du dossier thématique de Louvre consacré à Méroé.
Samedi, nous avons été au Louvre pour profiter de deux expositions d'archéologie, sur des régions de la Terre que je ne connais pas du tout : le Soudan, avec Méroé, un empire sur le Nil, et l'Arabie Saoudite, avec Routes d'Arabie - Archéologie et histoire du Royaume d'Arabie Saoudite.
Commençons par la plus imposante .... Routes d'Arabie réunit des centaines de pièces allant de la préhistoire la plus ancienne jusqu'à l'époque moderne. Les dernières pièces sont des photos datant du début du XXème siècle.
Difficile de synthétiser 2 millions d'années d'histoire en quelques salles, et d'autant plus difficile que l'histoire de cette région m'est totalement inconnue.
Après avoir vu quelques outils taillés datant de l'Oldowayen (époque d'Homo habilis) et du Paléolithique supérieur, nous entrons dans le néolithique. J'ai beaucoup aimé les statues menhir, très proches de celles qu'on peut trouver en Europe à la même époque, ou des statues grecques cycladiques. Je trouve ces êtres hiératiques, dont seuls les traits les plus marquant se détachent de la roche, d'une beauté très sobre et moderne.
Deux statues anthropomorphes
Le temps passant, on voit l'Arabie sortir de la Préhistoire et devenir un carrefour des cultures. En particulier, l'influence de sa belle voisine la Mésopotamie devient de plus en plus visible ; mais d'autres contrées nourrissent cette presqu'île : on retrouve des traces des civilisations de l'Indus, ou de l'Egypte parmi les restes retrouvés. Les routes de l'Encens, nourries par la demande sans cesse croissante de cette matière pour les cérémonies religieuses, se mettent en place, créant des cités caravanières d'une immense richesse.
Des royaumes prospères se développent à partir des oasis. L'un d'entre eux, le Royaume de Lihyan est plus particulièrement présenté dans l'exposition, avec trois statues colossales et admirablement belles...
Statues de rois de Lihyan
Des photos de tombes plus récentes (premier siècle après JC) provenant de Hégra m'ont fait penser au site de Pétra. L'influence gréco-romaine se fait sentir, dans le style quasi-classique des entrées des sépultures.
L'exposition explique avec force détail la manière dont ces façades ont été sculptées, montrant l'ingéniosité et l'immense savoir faire technique de ce peuple.
Photos du site d'Hégra, provenant du site du CNRS.
L'influence romaine devient encore plus prégnante après la conquête de l'Arabie par Trajan, comme le montrent de nombreuses pièces présentées dans l'exposition.
Le second volet de l'exposition porte sur l'apparition de l'Islam, l'établissement des routes de pélerinage et le rôle de La Mecque et de Médine. L'art devient beaucoup plus élaboré ; les empires s'agrandissent ; culture et science se développent. Mais parmi les oeuvres les plus émouvantes de cette partie se trouvent les nombreuses pierres tombales provenant d'un cimetière situé au nord de La Mecque, où des personnalités importantes de l'Islam sont enterrées.
Ces pierres, souvent de basalte, sont admirablement sculptées, montrant la beauté de l'écriture arabe. C'est une vraie démonstration de caligraphie !
Une des épitaphes est traduite et m'a beaucoup touchée (comme vous le savez déjà, j'aime les épitaphes !)
"Que son tombeau soit abreuvé par les nuages chargés de pluie qui se déverseront sur lui en ondée
Ci-gît le jeune homme enlevé aux siens et à ses aimés [...]
Chaque jour la mort déploie son linceul mais pourtant nous demeuront insouciant à ce qui nous attend
Ne te fie pas à ce Bas-Monde et à sa beauté même si la belle se pare de ses plus beaux atours
Que sont nos aimés devenus et nos proches qu'ont-ils fait ?
Où sont ceux qui étaient apaisement ?
La mort leur a fait boire la coupe impure
Ils sont devenus otages sous la terre accumulée"
(On dirait du Lamartine ...)
Enfin, l'exposition montre des objets provenant de ses lieux saints, comme la serrure du Sanctuaire de Médine, ou la porte de la Ka'ba, monumentale et splendide.
J'ai beaucoup aimé cette exposition, même si mon inculture m'a sauté aux yeux (je me suis d'ailleurs beaucoup aidée de ce blog pour réunir et ordonner mes souvenirs sur l'expo ...) En dehors de l'histoire européenne, je ne connais rien, ou presque. C'est quelque chose qui m'a beaucoup gênée pour m'y retrouver au milieu de ces centaines d'oeuvres. Et d'autant plus que la muséographie du Louvre reste encore très indigente. Même si des efforts de pédagogie ont été effectués, je les trouve encore bien loin du talent montré par les muséologues anglo-saxons.
Quoiqu'il en soit, je vous conseille cette magnifique exposition, ouverte jusqu'au 27 Septembre prochain !
"N'y va pas, j'veux que tu gardes un oeil vierge pour le mien !"
L'avis de Céline
C’est un très beau et doux film que nous avons été voir Jeudi. Un poison violent raconte les vacances de Pâques d’Anna, 14 ans, qui revient de pension dans son village d’enfance. Unité de temps et de lieu (à la seule exception de l’épilogue), unité de sujet aussi, puisque le film traite d’une crise. Crise d’adolescence, crise de foi, crise de la quarantaine pour le très beau personnage de la mère.
Deux trios se font face : Anna, Pierre, son camarade de classe, et Dieu d’une part ; Jeanne, sa mère, Paul, son père, et le père François, son curé. En miroir du couple parental qui se déchire, et tandis que sa mère va chercher le réconfort dans ses confessions au père François, Anna se sépare par degrés de Dieu, n’y trouvant plus les réponses aux questions qui l’assaillent et développe une idylle toute en délicatesse avec son camarade de classe Pierre.
Ce chassé-croisé entre la mère et la fille, la mère se séparant de son amour terrestre pour se tourner vers Dieu (ou plutôt vers son serviteur), la fille perdant son amour spirituel pour trouver les délicieux tourments du désir avec Pierre, est admirablement bien rendu, avec de nombreuses scènes se faisant écho (la scène du premier baiser, par exemple).
J’ai beaucoup aimé la manière dont sont opposées spiritualité et chair, avec le grand père et l’évêque pour les représenter l’une et l’autre. Face à l’évêque, un vieil homme froid, le grand-père (joué par un Galabru en pleine forme) est un Silène qui bouffe, qui pète, qui bande. Dans cet immense corps immobilisé dans un lit, se dégage une puissance de vie, un amour de la vie, qui balaie tout sur son passage, du curé venu prendre onctueusement des nouvelles, à la foi de sa petite fille. C’est lui qui, de loin, la fait s’allonger sur la « pierre à sacrifice » où Pierre va l’embrasser ; c’est lui qui, le premier, voit la femme en elle, la future mère, la future amante. C’est lui qui, par ses disques, ses revues, ses propos, lui démontre le caractère joyeux et lumineux de la sexualité et du désir, bien loin des propos de l’évêque, qui n’y voit que « débauche, impuretés, obscénités, idolâtrie, sorcellerie, haine, querelles, jalousie, colère, envie, division, sectarisme, rivalités, beuveries, gloutonneries et autres choses du même genre ». L'opposition se trouve aussi dans les lieux. Face à l'église glaciale et immense, face au cérémonial de la messe, c'est dans les bois et sur les pierres, en pleine nature que Pierre et Anna communient. Au moment du choix, Anna choisit la vie et la chair – et le paganisme.
Au delà même de cette réflexion profondément mystique, Un poison violent est surtout un magnifique film sur l’adolescence, sur sa crise, entre désir d’absolu et tentation de la vie, entre plaisanteries avec les copines et discussions avec sa mère, connaissance de soi et découverte des autres, entre la petite fille et la jeune femme. Le jeu de Clara Augarde, qui m’a un peu destabilisée, rend finalement très bien ces doutes et ces incertitudes, cette sensation de mal-être diffu.
Les autres acteurs ne sont pas en reste. En particulier le père de Clara, qui m’a fait fondre en larme juste en le voyant dévasté par le chagrin. Et surtout le père François, qui dresse un magnifique portrait d’homme tout d’un coup bousculé dans sa foi, tourmenté par ses désirs, incapable de porter les chagrins de son troupeau. La scène où on le voit se tordre et implorer Dieu dans son lit est splendide.
La réalisation est elle aussi extraordinaire : elle ne démontre jamais, n'explique pas, ne cherche pas à expliquer, mais, toute en légéreté, nous montre et nous donne à penser. Katell Quillévéré nous invite dans cette famille en plein marasme, et nous rend spectacteur de ce qui s'y passe, sans jamais chercher à briser la barrière des corps. A nous de chercher ce que pensent et ressentent les êtres, avec les rares pistes qui nous sont données, et le langage des corps et des regards. Je comprends que cette mise en scène puisse déstabiliser et déplaire ; elle m'a au contraire totalement séduite.
Enfin, l'image et la bande originale sont de toute beauté. Je pense en particulier à cet après midi sous la pluie, bercée par la musique de Greensleeves et les paroles de ce roi, lui aussi victime de ce "poison violent".
De manière plus anecdotique, ce film m'a aussi beaucoup touchée car j'y ai retrouvé beaucoup des ambiances dans lesquelles j'ai passé mes vacances, ado. J'ai retrouvé les mêmes bols de petit déjeuner j'ai retrouvé la pluie qui tombe sans se lasser, les journées de bouquinage, à peine habillée dans un grand pull, les lectures de BD, les copines qu'on retrouve le temps d'un papotage, les églises où des maquettes de bateau pendent du toit, ces angoisses sur ce corps qui se transforme... C'est sans doute ce qui m'a fait me sentir aussi proche d'Anna...
L’avis de B.
Katell Quillévéré réussit son premier film, Un poison violent, qui tire son titre d’une chanson de Gainsbourg à propos de l’amour. J’ai aimé même si le film n’est pas exempt de certains défauts qui m’ont un peu gêné.
Le synopsis peut paraître assez simple : une jeune adolescente sur le point de faire sa confirmation est aux prises entre l’attrait de la chair et de l’esprit. Quelle drôle d’idée que d’opposer chair et esprit mais, vous l’aurez compris, cette pauvre Anna est catholique, qui plus est avec cette violence de la foi des enfants (une prière avec l’icône pressée sur le sein – ce pauvre Jésus devait en être tout chose).
Anna vit dans un internat catholique afin de ne pas assister au déchirement de ses parents. Elle revient dans sa famille pour les vacances de pâques afin d’effectuer sa confirmation et trouve son père parti et sa mère Jeanne, splendidement interprétée par Lio, en pleine dépression. C’est dans cet état que Jeanne tente de se recentrer sur la religion dans laquelle elle a été élevée et qu’elle avait abandonné pour son mari. La religion est incarnée par le père François, plutôt sympathique et bon curé de campagne, proche de ses ouailles (une très belle scène le montre jouant comme un gamin au foot avec les enfants du village) et lui-même en proie aux affres de son désir pour Jeanne.
Dans ce champ de ruine, Anna est tiraillée entre sa foi d’enfant, pure et absolue, représentée par l’évêque ascète qui, dans son église glaciale, vilipende les tendances de la chair et le désir naissant qu’elle sent naître en elle, représenté par le jeune Pierre, sous le patronage égrillard de son grand-père, formidable Michel Galabru en vieillard impotent et jouisseur, païen au dernier degré (il entonne une chanson paillarde lors de la seule visite que le curé du village tente de lui faire), qui bande alors que sa petite fille lui fait sa toilette matinale et finit même par lui demander de lui montrer « l’endroit dont il vient ».
Vous l’aurez compris, nous faisons ici une plongée dans la religion catholique comme le montre la première scène à la messe. Katell Quillévéré nous montre deux fois absolues en la personne d’Anna et de sa mère. Comme dit plus haut, Anna a la foi des enfants, absolue et pure, la foi qui n’a encore jamais connu le doute de la chair alors que Jeanne, sa mère, a elle la foi mortifère de la déception, de ceux qui ont connu la chair mais que la chair a abandonné (son mari, un personnage séduisant mais lâche est parti vivre avec une autre et la laisse se racornir) et qui n’ont plus que le vide et le tourment à présenter à leur Eglise. Face à la naissance du désir, patronnée par son grand père, elle s’essaie pas à pas à la sensualité dans les bras du jeune Pierre (jolie image du premier baiser sur une pierre de sacrifice païenne). C’est ce qui provoque en elle un doute qui la conduira à renoncer à sa confirmation (un très joli évanouissement devant un évêque abasourdi).
Ce que nous laisse entendre Katell Quillévéré c’est que ce rejet absolu et imbécile de la chair par la religion catholique, cette volonté de mutiler l’être humain dans ses pulsions, va conduire Anna à s’éloigner de son dieu. Le jeune curé de campagne, lui aussi proie au doute et au désir aurait bien mieux su expliquer à Anna que non, l’esprit ne s’est jamais opposé à la chair.
C’est un joli film très lent, très contemplatif, qui procède par petites touches pour suggérer le chemin franchi par Anna (elle finira par choisir de s’évanouir en pleine église devant un évêque ébahi afin d’éviter sa confirmation). C’est une chose que j’ai aimé dans le film quoique j’aurais apprécié que certains éléments soient un tout petit peu plus explicites (après en avoir discuté avec Céline, certaines scènes qu’elle a immédiatement comprises pour avoir plus ou moins ressenti ce genre de choses à cet âge n’était pas du tout clair pour l’ancien petit garçon que je suis).
Anna est superbement interprétée par Clara Augarde, toute en délicatesse, retenue et timidité. Pas de grands éclats, pas de déballages de tripes, juste une belle jeune fille qui s’illumine de complicité avec son père, hésite, pleine de maladresse face à l’inconnu de son éveil au désir et de l’apprentissage du regard de l’homme.
La mise en scène est très discrète mais il faut avouer que le genre ne se prête pas nécessairement aux prouesses de ce côté-là. La photographie est parfois inégale mais certaines scènes sont très belles et Katell Quillévéré sait créer des ambiances et laisser les personnages évoluer dans des séquences assez longues. Elle filme la beauté naissante et les hésitations d’Anna avec une très belle délicatesse (notamment de nombreux plans sur les cheveux magnifiques de Clara Augarde et ses regards timides).
J’ai toutefois été beaucoup gêné par le montage. J’ai en effet trouvé que les transitions entre les scènes étaient parfois très abruptes ce qui conduit à trop découper le récit nuire à sa fluidité. J’ai aussi trouvé que Katell Quillévéré manquait par moments de courage. Elle amène en effet ses personnages à des moments de gêne mais les laisse alors immédiatement pour passer à la scène suivante. Pourquoi ne pas laisser cette gêne s’installer un peu plus et montrer le maigre prétexte extirpé à grand peine pour se séparer ?
Il reste que le film est malgré cela une réussite et une excellente surprise. Je pense que ses défauts s’expliquent aisément par le fait qu’il s’agit d’un premier long métrage. La réalisatrice montre à mon sens ici un joli talent.
Enfin, une mention toute particulière à la bande originale dominée par le magnifique Creep de Radiohead repris par la chorale Scala.
Je viens de me rendre compte que j'ai complètement oublié de vous parler de deux challenges organisés sur le forum Whoopsy-daisy, challenge auxquels je me suis inscrite il y a déjà quelques semaines...
Le premier est le challenge Three Christie for Christmas, proposé par Popila. Il s'agit de lire trois romans d'Agatha Christie d'ici Noël, dont, obligatoirement, l'un met en scène Poirot, l'autre Miss Marple, et le dernier, un autre détective de l'auteur anglaise.
Le second, lancé par Emjy, consiste à lire trois pièces de théâtre (et il est sans limite de temps). Je me suis inscrite pour lire La vie est un songe, de Calderon, Hamlet, de Shakespeare et Andromaque, de Racine.
Je vais continuer par une sorte de coup de gueule, qui m'est venu en lisant l'article de Keisha sur A quand les bonnes nouvelles de Kate Atkinson.
J'ai découvert Kate Atkinson, au début des années 2000, en furetant dans la bibliothèque de ma mère. Dans les replis du temps ... Le titre m'intriguait, et les premières pages m'ont enchantée. Et c'était parti pour une épopée dans un monde où Shakespeare se promène encore dans les bois, où des fées étranges sortent des forêts et où des mères s'y perdent, où les amoureux de collège finissent par se tourner vers leurs adoratrices. J'ai été complètement emportée par ce roman étrange, sans queue ni tête, mais avec une poésie étonnante.
J'ai poursuivi par Dans les coulisses du musée, qui m'a aussi fascinée, puis Sous l'aile du bizarre, qui fut une petite déception (je n'y ai pas retrouvé le charme envoûtant des deux premiers, même si ce fut une lecture agréable). J'ai moins aimé son recueil de nouvelles C'est pas la fin du monde : son charme, son univers met du temps à se mettre en place et le temps d'une nouvelle lui est trop court.
Puis est venue La souris bleue, une merveille, un délice, qui m'a fait le même coup que Dans les replis du temps. Un chef d'oeuvre, une merveille de construction et d'originalité. J'ai été emportée et je lui ai même pardonné le personnage de Jackson Brodie, assez inutile à l'intrigue, si ce n'est comme liant.
Malheureusement, Kate Atkinson a, suite au succès de Jackson Brodie, abandonné l'ambition de construire des drames familiaux étranges et compliqués, pour la tâche, infiniment plus commune, de faire vivre un détective privé dépressif. En j'en ai marre. J'ai perdu mon auteur adorée pour une auteur de romans policiers certes corrects, mais qui n'arrivent qu'à la cheville de ses précédents romans. Et un de mes espoirs secrets (que la série des Jackson Brodie s'interrompe) vient de sombrer : son dernier roman Started early, took my dog, vient de paraître au Royaume Uni, 'featuring Jackson Brodie'.
Mais bon, il ne faut pas lui en vouloir, elle a obtenu ce qu'elle voulait : ses romans vont être adaptés par la BBC. Et voilà mon auteur aimée et chérie transformée en scénariste de luxe pour série télé...
Je poursuis avec des nouvelles de l'adaptation d'un roman qui m'a profondément émue et touchée l'an dernier, et que je recommande à tous : Auprès de moi toujours, de Kazuo Ishiguro. Le film sortira très prochainement aux Etats-Unis (le 15 Septembre), mais il faudra attendre le 9 Février pour le voir en France (j'ai hââââââte).
Je vous conseille de lire le roman avant que le buzz autour du film ne donne trop d'infos sur son synopsis. Sans être un thriller, connaître trop tôt le mystère qui rôde gâcherait le début de l'intrigue.
Même si je n'aime pas du tout Keira Knightley (mais je n'aime pas du tout Ruth, son personnage non plus...), je trouve les premières photos extrêmement belles et reproduisant bien l'ambiance et le style nostalgique d'Ishiguro.
Pour la première fois, je participer à la Lecture commune Sexy Ecrivains de Celsmoon qui porte en Septembre sur Paul Auster. Je vais en profiter pour lire le premier volume de la trilogie New-yorkaise, qui patiente sur ma PAL depuis ... longtemps.
Et j'en profite pour dire ici que je suis très triste de son départ de la blogo. C'est un des blogs que je lisais avec le plus de plaisir qui s'en va ...
Les conventions françaises de Science Fiction et de Fantasy débutent à Grenoble, nous dit Phooka : elles durent du Jeudi 26 Août au Dimanche 29, sur le campus de la fac. Si vous êtes pas loin, allez y ! Cette convention aboutira à la remise d'un prix, le prix Elbakin.net, dont les nominés sont présentés ici.
Dans le même registre, Aidan nous révèle les noms des nominés pour le World Fantasy Award 2009. Je n'en connais aucun, à part le Song of the dying Earth, publié sous la direction de George R. R. Martin que j'ai déjà vu trainer en librairie. En revanche, ça me donne des idées de titres et d'auteurs à aller découvrir.
Sinon, Le Golb chante les louanges de Kaamelott (et comment pourrais-je n'être pas d'accord avec lui ?), Mathilde m'a fait découvrir un petit groupe de folk très sympa que j'écoute en boucle, 1973, Audouchoc nous écrit son Harlequin (hilarant, comme toujours), A. C. de Haenne nous informe que les éditions Belials testent le prix idéal d'un livre (celui que vous fixez ), Sandra revoit Ludwig, le crépuscule des dieux et nous en livre une critique passionante, Matthew nous donne une définition de la chick lit', Lord Orkan Von Deck nous présente les réseaux français de steampunk dans sa gazette du steampunk, L'Express par du jeu entre blogueurs et entreprises et du petit débat qu'il y avait eu sur le blog d'Antigone en Avril, A.C. de Haenne nous concocte une histoire de la Fantasy au cinéma dont j'attends la suite avec impatience !