Pour moi, Revolver c'est une matinée de printemps, ou peut-être de début d'été. Je suis dans mon labo, à ma paillasse, et manipe en écoutant Inter. Quelques notes nouvelles, et je tombe en amour : Get around town, cette chanson est faite pour moi.
A chaque fois que je ré-entend cet album, je me revoie dans ce labo solitaire, la lumière vive entrant à plein, et le sourire aux lèvres d'avoir découvert un nouveau groupe et une nouvelle chanson.
Il m'a fallu quelques mois pour découvrir leur album, Music for a while. Un hommage à Purcell auquel je ne pouvais pas rester insensible.
Ça commence avec une note répétée, lancinante. Un accompagnement à la guitare. Un choeur de voix s'élève, répètant une mélodie. "So many times, I try to hear What you were Trying to say." Une mélancolie douce, une nostalgie amère, coupée brutalement par le violoncelle et la basse. "We are only two. But it's not hard to do."
L'album commence comme d'autres se finiraient...
J'adore ce clip !
Tout l'album n'est pas dans ce registre, et dès la seconde chanson Leave me alone, plus folk, plus rythmée, le sourire revient - encore un peu amer peut-être : même avec le sourire, ne parle-t-on pas d'une rupture ? Balulalow devient franchement pop, avec son refrain joyeux. Et peut-être pour la première fois, apparait clairement ce qui fait la force de ce groupe : les voix. Ces trois garçons ont des voix franchement impressionnantes, sûres et justes, et surtout, se mariant avec bonheur. En concert, leurs improvisation a capella, sans micro, passent comme une lettre à la poste.
Bref retour en mineur avec Do you have a gun, et son histoire d'amour contrariée, avant de revenir à une petite chansonnette gaie et lumineuse, au refrain insouciant qui donne envie de partir aux côtés de Luke, Mike and John dans un road-movie aux allures de western.
Quelques chansons plus loin, on arrive à Get around town, qui reste à mon avis la plus équilibrée, si non la plus belle (je garde ce titre pour Birds in Dm qui me bouleverse à chaque écoute) des chansons de l'album. Sur un rythme entraînant, les trois chanteurs nous entraînent en prison comme un joueur de flûte de Hamelin.
Et la conclusion, désabusée et douce, vaguement mélancolique, arrive trop vite.
Si je vous parle de cet album maintenant, c'est que j'ai eu la chance de les voir en concert la semaine dernière. Que dire ? Ce n'est peut-être pas (pas encore ?), un groupe de scène : ces trois jeunes garçons sont très sages, très sérieux (et d'ailleurs, le sérieux avec lequel ils abordent la musique fait la qualité de leur album) et sans doute un peu timides. Et peut-être que l'ambiance très intime, très cosy des Bouffes du Nord n'inspirait pas aux déchaînements de passions. L'atmosphère était douce, amicale et chaleureuse quand les trois musiciens sont venus à l'avant scène, à quelques mètres de nous, avec leurs guitares sèches et leur violoncelle, et ont commencé, sans discours, à chanter. A ce moment, il n'y avait plus que la musique, et la beauté de leurs chansons.
L'ambiance s'est un peu échauffée quand ils sont retournés sur la scène, ont saisi leurs basses et leurs guitares électriques. Ça a plus swingué quand le batteur est entré. Malgré tout, une douce torpeur avait saisi le public, qui a été lent à se réveiller.
Mais à la fin, il était debout le public. Et l'annonce de la sortie d'un prochain album, si je dois appliquer mon sentiment à ceux qui m'entourait, a ensoleillé cette fin de concert.