"He needed a woman whom he could talk to, laugh with, eat with, love when the mood inclined him, bore and sleep with. A woman who didn't plague him with woman's gossip, or chatter of frills and laces, gown and bonnets. A woman who switched her mood to match his temper. A woman whose humour was broad as a barrack-room bruiser. A woman who, swept by anger, probably hit him. A woman who, when moved by passion, undoubtely hit him."
Mary Anne raconte l'histoire de l'arrière grand-mère de Daphnée du Maurier, Mary Anne Clarke, qui, élevée dans les plus pauvres quartiers londonniens, deviendra maîtresse de Frederick, duc d'York et d'Albany, commandant en chef de l'armée brittanique. C'est une femme étonnament attachante, pleine de vie et de rage, refusant de se soumettre, refusant d'être passive : fille d'une pauvre femme, elle travaille dès l'enfance et apprend seule à lire ; confiée à un pervers, elle s'enfuit ; mariée à un alcoolique, elle l'enferme ; quittée par un Prince de sang, elle le fait destituer. Face à elle, les hommes paraissent faibles et incapables : elle gère la carrière de son frère et de son fils, elle manipule les plus hauts gradés de l'armée, conseille Frederick, et mène sa vie comme une bataille - la victoire ou la mort.
"Only five years earlier, a prince of the blood had been broken by her. Women of her type were dangerous."
J'ai adoré ce roman. J'aime l'écriture de Daphnée du Maurier, toujours si limpide et musicale. J'ai passionnément aimé Mary Anne, dans toute sa rage, et Frederick, cet homme si simple dans un monde si complexe. Ils forment un couple absolument extraordinaire, romanesque au dernier degré, dans une Europe à feu et à sang, où seul le Royaume Uni résiste encore à Napoléon (et que fait son commandant en chef ? Il conte fleurette à Mary Anne...).
C'est la même époque que Jane Austen, mais l'ambiance est assurément très éloignée des bals et des thés : on se poursuit devant le juge, on écrit des libelles dévastateurs, on couche, on trompe, et pendant ce temps, Madame Frederick élève des chiens dans sa demeure luxueuse en province.
J'ai retrouvé le talent immense de Daphnée du Maurier : son style inimitable qui crée des univers, des personnages devant nous. Elle a fait vivre devant mes yeux les rues sales et misérables de Londres ; les réunions de libellistes dans des pubs enfumés devant une chope de bière ; l'ambiance des prétoires et des salons ... J'ai adoré !
Lu dans le cadre du challenge Daphnée du Maurier
Lu en VO
Lu en mer, sur le bateau, au large de Ouessant