« There is no band and yet, you hear the band »
J’ai profité hier des séances de ciné gratuites en plein air à la Villette pour aller voir Mulholland Drive.
Quelques mots sur le lieu : imaginez une immense prairie, un écran gigantesque se colorant alternativement de bleu, de jaune, de vert avant le début du film. Remplissez maintenant cet écran d’une foule compacte en train de pic-niquer, jeunes, familles, gamins courant dans tous les sens et vous aurez une petite idée du cadre.
Passons au film.
Une voiture roule dans la nuit, les phares allumés. Elle entre dans Mulholland Drive, une route escarpée qui monte dans les collines autour d’Hollywood. Le chauffeur s’arrête dans un virage, demande à la jeune femme aux cheveux noirs et aux lèvres écarlates de descendre. Il fait sombre et angoissant. Elle s’étonne, et durant ce temps d’hésitation, une voiture remplie de jeunes gens joyeux arrive dans l’autre sens et c’est l’accident. Pendant un bref moment, on aura vu son visage pâle, éclairé par la lumière blanche des phares, tétanisé, attendant le choc inévitable.
Par miracle, elle s’en sortira indemne. Avant que les secours et la police n’aient le temps d’arriver, elle s’enfuit et redescend vers la ville. C’est après qu’elle fera la rencontre d’une jeune fille blonde et diaphane, fraîche et joyeuse, Betty. Elles partiront toutes les deux à la recherche de ce que la brune Rita perdu dans l’accident : sa mémoire.
Mais je ne crois pas que l’histoire, si on arrive à la suivre, soit la chose la plus intéressante de ce film. Ce qui est fascinant, c’est ce qu’on voit : Lynch filme avec énormément de justesse et de talent. Il arrive à nous promener dans le monde qu’il a créé, nous faisant ressentir à son gré, tantôt l’angoisse dans un jardin ensoleillé, tantôt l’intimité au creux d’un lit, le stress de la première audition, le bonheur du premier regard amoureux, l’absolue peine d’avoir été quittée et de voir son amour dans les bras d’un autre.
Et les actrices jouent tellement bien ! Naomi Watts en particulier est absolument géniale, montrant des personnalités tellement différentes et jouant chacune d’entre elle avec bonheur, de la jeune ingénue heureuse et optimiste à la femme abandonnée et malheureuse.
Et la bande son …
Bref, un vrai chef-d’œuvre qui nous perd et nous promène, qui se joue de nous, spectateur. Je pense que pour l’apprécier à sa juste valeur, il ne faut pas chercher à le comprendre, chercher une logique, mais juste se laisser porter dans un univers baroque et inquiétant.