"Et, que voulez-vous ? Puisque personne ne m'aime, il faut bien trouver un moyen de passer le temps !"
Les visiteurs du soir est le premier - et je crois le seul - vieux film que mes parents m'aient montré. Une belle histoire d'amour entre ce film fantastique et ma mère, qui remontait aux années 60. Alors, quand j'ai vu que la Filmothèque du Quartier Latin le repassait la semaine dernière, j'ai bien entendu emmené mes parents le voir avec moi !
Dans le Sud de la France, au Moyen-Âge, voyagent deux ménestrels, Dominique et Gilles. Dominique est une belle femme androgyne, habillée en homme, et au sourire ironique (merveilleuse Arletty) ; Gilles (Alain Cuny) est un homme plein de prestance, mélancolique et rêveur. L'un et l'autre s'avancent côte à côte sur un chemin rocailleux, vers un château de carton-pâte. Lorsqu'ils s'approchent, un paysan - en fait le bourreau, leur annonce que le château est en fête car le Baron Hugues marie sa fille, la splendide Anne, à Renaud. Deux ménestrels sont donc sûrs de trouver bon accueil dans le château !
Mais Gilles et Dominique ne sont pas que deux ménestrels : ce sont deux envoyés du Diable, venu l'un pour séduire Anne la vertueuse, et l'autre Renaud et Hugues.
Dominique réussira sans peine sa tâche, créant chaos et haine dans le domaine ; mais Gilles, devant la pureté, la naïveté d'Anne succombera à l'amour, et le Diable devra intervenir lui-même.
C'est un film sur lequel j'ai un avis très contrasté : j'ai adoré, sauf l'histoire d'amour entre Gilles et Anne, dégoulinante de niaiserie. Mais tout le reste, la "beauté du diable" exercée par ces deux êtres sur ceux qu'ils approchent, l'atmosphère de Moyen-Âge de carte postale, les dialogues écrits par Prévert, l'ambiance fantastique qui imprégnent peu à peu tous les êtres, m'ont séduite.
Autant Alain Cuny - beau ténébreux de l'époque - m'a guère convaincue, autant j'ai été séduite par Arletty. Elle que je n'imaginais pas dans un rôle tragique de femme perdue, désespérée et cruelle, transcende le rôle, manipule avec grâce ceux qui l'approche, pour un sourire de celui dont elle est la "fille préférée" : le Diable.
Car voilà l'autre acteur extraordinaire de ce film : Jules Berry. Un Diable vif comme la flamme, intelligent comme le mal, cruel, vicieux, odieux et profondément humain.
Vu dans le cadre du challenge Golden Age, sur whoopsy-daisy !