"Car en ce monde assurément, Clothalde, tous ceux qui vivent, rêvent."
Ayant déjà vu cette pièce au théâtre, l'histoire et le style m'en étaient déjà connus. Mais j'avais eu un tel coup de coeur que je voulais me replonger dedans, sans avoir la mise en scène baroque du Théâtre 13 devant les yeux.
Encore une fois, j'ai adoré !
(attention, spoiler inside)
La vie est un songe raconte deux histoires qui se mêlent intimement et se résolvent en même temps. La première et principale histoire remonte à bien loin, à la naissance du prince Sigismond. Son père, savant et astrologue, prédit que son fils mettra le pays à feu et à sang. Il décide donc d'enfermer l'enfant à peine né, comme une bête sauvage ; un seul de ses proches, Clothalde, a le droit de lui parler et l'élever, ce qu'il fait avec beaucoup de soin, initiant son protégé à la philosophie et à la beauté.
Sigismond grandit comme un être blessé et solitaire, plein d'une sensibilité à fleur de peau. Une sorte de poète romantique avant l'heure. "Quand j'évoque cette passion, en volcan, en Etna tout métamorphosé, je voudrais de mon sein arracher des lambeaux de mon coeur ; dites-moi quelle loi, quelle justice ou quelle raison peuvent aux hommes refuser un si doux privilège, une exemption si capitale, que Dieu même octroie au cristal, au poisson, à la bête, à l'oiseau ?"
Lorsque commence la pièce, le roi Basile sent sa fin approcher, et cherche un successeur. Avant de céder la couronne à son neveu et à sa nièce, doutant tout d'un coup du verdict des étoiles, il décide de tenter une folie : libérer Sigismond, le mettre sur le trône pendant une journée et observer les conséquences. S'il se révèle bon roi, l'y laisser ; s'il la parole des étoiles se déclare juste, le renvoyer endormi dans sa prison, lui laissant croire que cette journée ne fut qu'un songe.
La seconde histoire tourne autour de Rosaure, une jeune femme trahie, abandonnée par son amant, comme sa mère le fût autrefois par le père de Rosaure. Elle le poursuit (l'amant, pas le père), ayant en main une arme que sa mère lui a donné, l'assurant qu'elle serait, grâce à elle, protégée par un gentilhomme.
Le gentilhomme se révèle être Clothalde, le gardien de Sigismond. Il reconnait sa fille, épouse sa cause, la met au service d'Etoile, la nièce du roi. Mais l'amant infidèle n'est autre qu'Astolphe, le neveu du roi, qui n'a trahi que pour épouser Etoile.
(suis-je claire ?)
Cette seconde intrigue, en plus d'ajouter une couche de complexité adorablement baroque, donne un peu de légéreté à la pièce (autrement très sombre et très sérieuse) et apporte des quiproquos amusants. Heureusement, tout se terminera bien, et les quatre jeunes gens connaîtront le bonheur après toutes ces intrigues (même si épouser Astolphe est un malheur que je ne souhaite pas à ma pire ennemie ...).
C'est, autrement dit, une pièce admirable, parlant de la fatalité, de la prédestination, des dangers de la connaissance, et surtout de l'insignifiance de la vie. Un pièce-monde
Ce fut pour moi un énorme coup de coeur, et un livre que je relirai souvent...
"Qu'est ce que la vie ? Un délire ? Qu'est donc la vie ? Une illusion, une ombre, une fiction ; le plus grand bien est peu de chose, car toute la vie n'est qu'un songe et les songes, rien que des songes."
Lu dans le cadre du challenge Pièce de théâtre ! de Whoopsy-daisy
Et fait partie de la PAL !